5 juin 2011, 7ème dimanche de Pâques A, Jn 17, 1b-11a /
Rendre gloire à Dieu, qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ? La question nous semble peut-être lointaine, pourtant dans les quelques versets proposés à notre méditation pour ce dimanche, ce n’est pas moins de six fois que l’évangéliste nous parle de gloire et de glorification, sans compter la première lecture, de la première lettre de Pierre, qui reprend, elle aussi par deux fois, ce même vocabulaire. La question n’est donc pas optionnelle : si nous voulons suivre le Christ, nous devons nous aussi rendre gloire à Dieu comme le Christ a rendu gloire à Dieu et, vous le savez déjà, cette gloire-là est bien loin de nos critères humains… Mettons-nous donc à l’écoute de l’évangile.
L’humilité de Dieu…
« Moi, je t’ai glorifié sur la terre en accomplissant l’œuvre que tu m’avais confiée. » (Jn 17,4) Toute la vie de Jésus Christ fut donc une glorification de Dieu, une révélation de l’être véritable de Dieu. Est-il venu en grande pompe pour éblouir le monde de sa grandeur, de sa majesté, de sa puissance et pour réclamer une soumission sans faille ? D’une certaine manière, si Dieu était vraiment ainsi, il n’y aurait pas eu besoin de la Révélation. Ce Dieu-là, c’est celui que les hommes ont imaginé depuis la création du monde, pour lequel ils ont construit des pyramides immenses, sacrifié des humains et fait des guerres impitoyables. Jésus de Nazareth, lui, qui pourtant était le vrai Dieu, a vécu trente années, dont nous ne savons quasiment rien, dans un obscure village de Palestine, et quand il décida de se manifester, il le fit en changeant de l’eau en vin, en guérissant des malades, en s’invitant chez des publicains ou en prenant la défense d’une femme adultère ! Ne sommes-nous pas trop habitués à ces textes d’évangile, au point de ne plus percevoir le hiatus entre nos images de Dieu et le visage si humble qu’il nous révéla ? De plus, l’ultime révélation sera celle de la Passion et de la Croix, annoncée en ces termes : « Père, l’heure est venue. Glorifie ton Fils, afin que le Fils te glorifie. » (Jn 17, 1) N’allons pas trop vite du côté de la Résurrection : un Dieu qui ressuscite c’est « normal », mais un Dieu si humble qu’il se laisse malmener « comme un agneau que l’on mène à l’abattoir », un Dieu qui pardonne à ses bourreaux et qui respecte le refus des hommes jusqu’à mourir… cela c’est inimaginable ! Un Dieu glorifié par son humilité ? Quelle révélation !
La fraternité des disciples…
Après sa passion, comment Jésus Christ compte-t-il poursuivre sa mission de glorification du Père ? En apparaissant ressuscité, triomphant, au sommet du Temple de Jérusalem ? Non point… Mais en s’en remettant entièrement à ses disciples : « Je prie pour eux… et je trouve ma gloire en eux. Désormais, je ne suis plus dans le monde ; eux, ils sont dans le monde… » Ou encore, quelques versets plus loin : « Que tous soient un comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi ; qu’eux aussi soient un en nous afin que le monde croie que tu m’as envoyé. » (Jn 17, 21) Un Dieu qui s’en remet entièrement à la fraternité de douze bons hommes et quelques autres disciples pour se manifester : quelle glorification ! Quelle révélation !
La gloire retrouvée ?
« Donne-moi la gloire que j’avais auprès de toi avant le commencement du monde ! » (Jn 17,5) Attention la tentation est grande de retomber dans nos images d’avant révélation ! On pourrait en effet interpréter cette expression de Jésus comme un retour à une « vraie gloire » de « vrai Dieu », passé la parenthèse de l’Incarnation. Or il n’en n’est rien ! Jésus Christ est venu nous révéler qui est Dieu, et non pas jouer un personnage durant trente-trois années. Si nous retombons dans nos vieilles images d’une gloire trop humaine, la venue de Jésus Christ aura été vaine : « Or, la vie éternelle, c’est de te connaître, toi, le seul Dieu, le vrai Dieu, et de connaître celui que tu as envoyé, Jésus Christ. » (Jn 17,3) Depuis avant le « commencement du monde » Dieu est ainsi : humble, fragile, tendre, bref « Tout amour »… et c’est cela sa gloire ! Et c’est cela que Jésus est venu nous révéler !
Saurons-nous alors glorifier Dieu ?
Lui bâtirons-nous des palais dorés ?
Ou emprunterons-nous, comme le Christ,
le chemin de l’humilité, de la fraternité, du service… de l’amour jusqu’au bout ?
Ping : Nouvelles du Togo | Le blog de frère Benoît
Togo ou pas Togo, vous êtes toujours aussi redoutable, P. Benoît ! Vous dites : « Pour ce dimanche, ce n’est pas moins de six fois que l’évangéliste nous parle de gloire et de glorification. »
En fait, c’est vrai ça, le mot gloire, ça veut dire quoi ? Vous jetez donc le trouble en nous à partir d’« un seul mot » ! ! Si je relève le défi, et que je joue avec le mot « gloire », je me rends compte que c’est peut-être un de ces mots polysémiques avec lesquels il est difficile de s’entendre : « Pour la plus grande gloire de Dieu », « Le jour de gloire est arrivé », « Un monument à la gloire des… », « Il s’en était fait tout une gloire », « La gloire de mon père » (M. Pagnol) , « Cet enfant est la gloire de sa famille », etc., etc… Il y a comme ça plein d’autres usages… qui n’acceptent pas les mêmes synonymes ! Donc, sens tout simplement différent ? ou bien y aurait-il quelque chose de commun dans tout ça ?
Mais vous êtes généreux, P. Benoît, vous donnez des clés de lecture : « Toute la vie de Jésus Christ fut donc une glorification de Dieu, …une révélation de l’être véritable de Dieu ». L’« être véritable » de quelque chose ou de quelqu’un, ce serait donc cela qui peut être appelé « sa gloire » ? … comme lorsque l’on dit d’un artiste dont le talent a trouvé sa voie : « Il est au sommet de sa gloire »… — Révéler cet être véritable, montrer cet être par le biais de sa plus grande perfection, c’est le « glorifier ». Évidemment, je ne suis pas en train de comparer Dieu à un artiste mais par analogie, peut-on y voir quelque chose ? ou pas ?
Puis vous dites en finissant votre méditation : « Depuis avant le « commencement du monde » Dieu est ainsi : humble, fragile, tendre, bref « Tout amour »… et c’est cela sa gloire ! Et c’est cela que Jésus est venu nous révéler ! » Bref, si je lis bien : l’être véritable de Dieu, Dieu dans sa perfection ( si je puis m’exprimer ainsi), c’est l’Amour. Dieu n’est pas « un être qui « a » de l’amour », Dieu « est » l’Amour ; tout l’être de Dieu, c’est l’Amour. Or l’amour n’est ni triomphant, ni vaniteux, ni arrogant, ni même tout puissant, mais « humble, fragile et tendre » ; et pauvre. Alors qu’on pourrait s’imaginer un Dieu triomphant, on le découvre, grâce à Jésus, tout autre. C’est un choc ! !
Le Togo vous réussit bien, Benoît !