Un signe de Salut !

 

10ème dimanche, année C, Lc 7,11-17 /

Le Seigneur, saisi de pitié, littéralement « remué jusqu’aux entrailles » ramène à la vie le fils de la veuve de Naïm… Spontanément, on pourrait se demander pourquoi fait-il cela pour elle, et non pour d’autres ? Les situations de détresse qui nous remuent jusqu’aux entrailles ne foisonnent-elles pas aujourd’hui comme hier ? Pourquoi le Seigneur y reste-t-il sourd ? De quoi ce texte nous parle-t-il au juste ? D’abord, si vous le voulez bien, resituons ce texte dans son contexte, pour y découvrir un signe messianique, un signe de tendresse, un signe de salut…

Un signe messianique…

Le passage qui suit immédiatement le texte que nous méditons ce dimanche, rapporte le questionnement de Jean le Baptiste : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? » (Lc 7, 19) et Jésus de répondre aux disciples de Jean : « Allez rapporter à Jean ce que vous avez vu et entendu : les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres. » (Lc 7, 22) C’était écrit ! Dans un premier mouvement, on pourrait donc répondre que Jésus fait revenir à la vie le fils de la veuve de Naïm, la fille de Jaïre (Lc 8,54), ou Lazare (Jn 11,43) pour accomplir les Écritures concernant la venue du Messie. Mais vous sentez avec moi que cette réponse n’est pas tout à fait satisfaisante car elle semble instrumentaliser les faits et gestes de Jésus, et dénaturer la spontanéité des sentiments qui l’ont conduit à guérir, à purifier, à ramener à la vie et même à annoncer le Bonne Nouvelle aux pauvres. Car n’oublions pas que, lors du discours sur la montagne, l’évangéliste nous rapporte la même motivation de Jésus : «  Il fut saisi de pitié envers eux, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. Alors, il se mit à les instruire longuement. » (Mc 6,34)

Un signe de tendresse…

Ne nous faut-il pas avancer, toujours plus, dans la conviction que Dieu se révèle comme étant un Dieu de tendresse ? Ce qualificatif revient environ 35 fois dans la Bible (suivant les traductions) et notamment dans les psaumes : « Le Seigneur est tendresse et pitié. » (Ps 102,8) ; « Seigneur, ta tendresse est sans mesure. » (Ps 118,156) Décidément non, notre Dieu n’est pas un calculateur froid et sans sentiments, ce qu’il fait n’est pas écrit d’avance, mais c’est un être d’amour dont le cœur est infiniment plus vaste que le nôtre. Qu’il agisse ou qu’il n’agisse pas, soyons sûrs que c’est au nom de sa tendresse et de son amour… Jésus de Nazareth ne fait donc pas ceci ou cela parce que c’était écrit d’avance, mais parce que son cœur, sa nature, son être même lui commandent de le faire… Les Écritures, quant à elles, pressentaient cette tendresse en évoquant les signes à venir…

Un signe de salut…

Mais revenons à nos « pourquoi ? »… La première lecture, qui nous rapporte le retour à la vie du fils de la veuve de Sarepta, réalisé par le prophète Elie, nous donne peut-être une clef d’interprétation pour notre passage. Cette veuve, en effet, interpelle Dieu qu’elle met en cause à travers la présence d’Elie dans sa maison : « Tu es venu chez moi pour rappeler mes fautes et faire mourir mon fils ! » (1R 17,18)… La détresse de cette veuve met à mal sa relation à Dieu et risque de lui faire perdre la foi… N’est-ce pas le même ressort dramatique qui se retrouve dans l’Évangile ? Cette femme de Naïm, déjà veuve et qui perd son fils unique (comme la veuve de Sarepta), ne va-t-elle pas perdre la foi et renier Dieu en raison de sa détresse ? Alors le malheur serait à son comble car elle risquerait de se couper de la miséricorde de Dieu et de ne jamais retrouver les siens dans la communion des sauvés… N’est-ce pas cela qui remue Jésus jusqu’aux entrailles, le sort de cette âme en risque de perdition ?  Aussi, en ramenant à la vie le fils de la veuve, Jésus n’offre pas simplement un remède passager à la misère humaine, mais un remède durable, celui d’une foi en Dieu, d’une relation à Dieu renouées et solides qui traverseront toutes les épreuves à venir et même celle de la mort. À travers ce miracle impressionnant, le Seigneur invite chacun de nous à avoir confiance en lui au-delà de toutes nos épreuves : il est le maître de la vie ! L’essentiel n’est pas d’être épargné temporairement de certaines épreuves mais de vivre une foi et une relation au Christ solides et vivifiantes qui nous permettront de traverser toutes les épreuves et même celle de la mort afin d’entrer, avec toutes celles et ceux qui nous ont précédés, dans la vie éternelle !

Alors pourquoi ce miracle de la part de Jésus ?…

En quoi nous rejoint-il dans nos propres misères ?

N’est-ce pas une invitation à le reconnaître comme Messie,

rempli de tendresse et d’amour,

et désirant, par dessus tout, notre Salut ?

 

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9 réponses à Un signe de Salut !

  1. Sr Claudette Dumont dit :

    Bonjour Père Bigard,
    Merci pour votre méditation et les nouvelles de votre coin de mission.
    Je porte dans ma prière tous ces jeunes en formation.
    Hier, Fête du Sacré-Coeur, je suis allée célébrer au Monmartre alors que se terminait la retraite préparatoire à la Fête.
    Union dans la prière et l’accueil de la Parole de Dieu.
    Sr Claudette Dumont

  2. Christian Sacy dit :

    Mais tu ne réponds pas à la première question.
    Pourquoi Jésus guérit cette personne là, et pas les autres?
    Daniela.

    • Frère Benoît dit :

      Je croyais avoir répondu… Parce que c’est un signe qu’il est le Messie, parce qu’il est tendresse et qu’il s’est laissé touché, parceque son but n’est pas de faire revenir tous les défunts à la vie ici bas mais d’offrir un chemin de salut : une guérison définitve…

      • Monique dit :

        Je serais d’accord avec Daniela, P. Benoît, et votre réponse à sa question ne m’éclaire pas davantage. Ce que vous dites est sans doute très vrai et cohérent mais pourquoi celui-là a-t-il été l’objet de la tendresse de Jésus et pas les autres ? À moins qu’il faille comprendre que c’était un celui-là au hasard afin de faire comprendre un message… Mais ça, ça ne va pas avec la tendresse qui est toujours personnelle et jamais instrumentale, justement. …? ? ?

        • Frère Benoît dit :

          Je crois vraiment que mon commentaire n’a pas été compris… J’ai laissé entendre que s’il s’était laissé touché par ce cas c’est peut-être parceque la foi était menacée, ce n’était pas qu’une réponse à la souffrance… Ensuite les signes qu’a opérés Jésus étaient liés au hasard de ses rencontres… Comme disait le médecin de Lourdes, une fois que Lourdes fut reconnu comme lieu spécial de rencontre avec le Seigneur et de conversion, il n’y avait plus besoin de « miracles », de signes… Il en va de même pour Jésus… Il s’est laissé touché par toutes ses rencontres (on ne nous parle pas de rencontre de ce type où il aurait fait la sourde oreille), et il y avait nécessité de signes à son époque, ce n’est plus le cas aujourd’hui lorsqu’on sait qu’il est le Fils de Dieu Sauveur !

          • Monique dit :

            C’est peut-être le mot «miracle » qui nous pose problème au fond. J’ai suivi cette piste : son étymologie nous donne « merveille », « merveilleux », « étonnement », « admiration ». Jésus accomplissant des merveilles par compassion, ou miséricorde, pour cette veuve, par exemple, il montre « en même temps » qu’il y a autre chose qui se devine derrière cet acte qu’on ne comprend pas et qui nous étonne (miraculum) : un Dieu très grand qui nous aime. Il montre aussi et ainsi qu’il est bel et bien, lui, le Messie et que nous devons croire ce qu’il dit. Tout ce qu’il dit, même le plus étonnant (mirus), le plus étrange.

            Je crois alors vous comprendre, P. Benoît : il ne s’agit pas de limiter notre étonnement à la guérison en tant que guérison mais en tant que merveille qui ne peut venir que de, et par, celui qui est vraiment le fils de Dieu . Dès lors, la « guérison » du corps préfigure celle de l’âme. Et donc préfigure aussi le salut éternel.

            Qu’en dis-tu Daniela ? Que pensez-vous P. Benoît, est-ce que ma démarche apporte quelque chose de valide ?

  3. Daniela Sacy dit :

    Merci Monique, c’est exactement cela que je voulais dire.
    Daniela

  4. Tout le mystère de la vie et de la mort …

    Ce que l’on peut expérimenter de plus beau et de plus profond, disait Einstein, c’est le sens du mystère. Il ajoutait que ce principe « sous-tend la religion et toute entreprise artistique et scientifique sérieuse ».
    TLV

  5. Christian Sacy dit :

    C’est évident que s’Il avait guérit tous les malades, la question de la Foi ne se poserait même pas. Ce ne serait plus la Foi, ce serait le guichet automatique. On prie, on obtient.

    Vue de cet angle, on comprend très qu’Il ne guérisse pas tout le monde.

    Daniela

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