Régner comme le Christ !

24 novembre 2013, Christ Roi, année C, Lc 23, 35-43 /

Fête du Christ Roi

Fête du Christ Roi

            Nous sommes bien trop habitués à certains textes… Étonnons-nous de nouveau, en cette fête du Christ Roi, que soit proposée à notre méditation une scène de crucifixion, la figure d’un homme bafoué, raillé, torturé ! Lorsque nous pensons « royauté » et même dans les représentations habituelles du Christ Roi, ce n’est pas l’image du Christ en croix qui vient à notre esprit… « Si tu es le roi des juifs, sauve-toi toi-même ! » disent les soldats et, comme eux, nous imaginons tous qu’un roi doit être puissant, majestueux, décideur. Or, au Golgotha, nous assistons à un couronnement de l’existence du Christ, pour le moins surprenant, voire scandaleux… En quoi cette royauté déroutante du Christ est-elle Bonne Nouvelle pour nous aujourd’hui ? Si à notre baptême nous sommes devenus prêtre, prophète et roi, n’est-il pas essentiel de comprendre cette royauté du Christ afin de la faire nôtre ?

« Si tu es le roi des juifs, sauve-toi toi-même ! » (Lc 23,37). Cette interpellation des soldats ressemble étrangement aux tentations de Jésus au désert : « Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi en bas ;  car il est écrit : Il donnera pour toi à ses anges l’ordre de te garder » ; et encore : Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre. » (Lc 4,9-11) Oui, dans certains textes de l’Ancien Testament, le Messie-Roi attendu se présentait comme un vaillant chef d’armée, vainqueur de tous les ennemis d’Israël… Mais dans d’autres textes, surtout chez Isaïe, c’est la figure du Serviteur souffrant qui est mise en avant. Jésus a choisi son camp ; à travers sa vie, sa mort et sa résurrection, il nous dit que la véritable royauté n’est pas de ce monde, mais que régner c’est servir, se maîtriser et reconnaître que son autorité vient d’un Autre.

Régner c’est servir !

La mort du Christ est en cohérence avec ce que fut sa vie. À longueur de page d’évangile, Jésus se présente comme serviteur et invite les disciples à le suivre sur ce chemin du service, à ne pas rechercher la première place, mais la dernière.  Quel que soit le régime politique, les rois, les présidents, les premiers ministres sont en place pour le service de leur peuple ! Et j’imagine qu’un chef d’Etat pouvant regarder en arrière, avec fierté, ce qu’il a fait au service de sa nation, est beaucoup plus heureux que celui qui, au soir de sa vie, se présente devant Dieu avec une conscience qui lui reproche d’avoir profité de sa charge pour ne servir que lui-même et son clan ! Chacun à notre mesure, comment régnons-nous sur notre « petit royaume », c’est-à-dire notre famille, nos employés, nos amis, notre charge communautaire, etc. : en maître ou en serviteur ? Et sommes-nous bien convaincus que ce chemin du service est source d’une joie profonde et vraie, bien plus que les avantages passagers que nous pourrions tirer des charges qui nous sont confiées ?

Régner c’est se maîtriser !

Une autre dimension de cette royauté concerne la maîtrise de soi : régner sur soi et non pas se laisser conduire par ses instincts, par ses besoins. C’est ce qu’évoque notamment la première tentation : « ‘Si tu es le Fils de Dieu, ordonne à cette pierre de devenir du pain.’  Jésus répondit : ‘Il est écrit : Ce n’est pas de pain seul que vivra l’homme, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu’ » (Mt 4,3-4). Nos besoins, nos désirs sont à prendre en considération, mais il s’agit de les reconnaître pour ce qu’ils sont : les signes d’un manque, d’une finitude, d’un désir plus grand qui nous habite. Aussi, ne convient-il pas de vouloir combler tous ses besoins et désirs, sans quoi nous tuons l’instinct de vie en nous, le désir de plénitude et finalement la quête de salut. N’est-ce pas le drame de nos sociétés nanties, de ces enfants gâtés qui ne trouvent plus goût à la vie ? Alors que, dans les sociétés pauvres, la joie est, paradoxalement, souvent au rendez-vous ? La capacité de pouvoir régner sur soi est encore une bonne nouvelle en cette fête du Christ Roi, Lui qui nous en indique le chemin !

Régner c’est recevoir son autorité d’un Autre !

« Tu n’aurais aucun pouvoir sur moi, si cela ne t’avait été donné d’en haut » (Jn 19,11) dit Jésus à Pilate. Tout au long de sa vie, et jusqu’à la croix, Jésus montre combien, lui, agit selon la volonté de son Père et en union avec Lui. Et n’est-ce pas dans cette confiance jusqu’à la mort en croix, confirmée par la Résurrection de Jésus par son Père, qu’est signifié, de façon indépassable, que toute autorité vient de Dieu le Père ? Quelle libération, quelle joie que de pouvoir s’en remettre à la volonté de ce Père plein d’amour. Ceux qui veulent faire de Dieu un rival, et qui plaident pour une autonomie libératrice de l’être humain, permettent au contraire à toutes sortes de pouvoirs de prendre possession de l’homme : ses passions, l’argent, le dernier gourou à la mode, les manipulateurs de la consommation, etc. Le Christ nous l’assure : se mettre sous l’autorité de Dieu est source d’une libération définitive de tout mal et nous libère de toute tentation de nous mettre sous le joug d’un autre maître qui finirait par nous asservir. C’est se reconnecter à la source de la Vie. Voilà encore ce que nous célébrons dans la figure du Christ Roi !

Comme le Christ-Roi, désirons-nous servir, être maître de soi, recevoir son autorité de Dieu ?

Régner comme le Christ n’est-il pas Bonne Nouvelle pour notre vie aujourd’hui ?

 

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