Accomplissement !

22 décembre 2013, 4ème dimanche de l’Avent, année A, Mt 1,18-24 /

« Tout cela arriva pour que s’accomplit la Parole du Seigneur. » (Mt 1,22) Quel est cet accomplissement si cher à l’évangéliste Matthieu ? Accomplissement de l’attente messianique certainement, mais encore ? Pour nous, hommes et femmes du vingt-et-unième siècle, le Messie est venu il y a deux mille ans, mais qu’est-ce que cela a changé dans la marche de notre monde ? « Rien », pourrait-on dire, à vues humaines… Mais « Tout », si l’on porte sur le monde un regard de foi : le monde n’en est plus à ses balbutiements, le Règne de Dieu est en marche, le Mal est foncièrement vaincu, l’accomplissement du projet de Dieu pour sa Création avance à grands pas. À l’approche des fêtes de Noël, contemplons de près cet accomplissement en marche, pour qu’une joie profonde puisse nous animer et pas simplement une joie forcée et passagère pour le temps des fêtes.

Accomplissement du Projet de Dieu !

Fondamentalement, ce que nous célébrerons au jour de Noël, c’est l’accomplissement du projet de Dieu depuis la Création du monde ! On pourrait le résumer ainsi : depuis les origines, Dieu n’a pas voulu vivre refermé sur lui-même mais a désiré, d’un grand désir, partager son immense amour avec des êtres capables d’entrer dans une véritable relation d’amour avec lui. Cela nécessitait des êtres libres, intelligents, connaturels à Dieu. Et c’est ainsi que Dieu créa notre Monde : le règne minéral, le règne végétal, le règne animal, tous animés mystérieusement de l’intérieur par son Verbe créateur « Par lui, tout s’est fait, et rien de ce qui s’est fait ne s’est fait sans lui.» (Jn 1,3) Un monde, donc, avançant avec une logique (cf. logos), avec un sens… Mais pour conduire ce monde avec intelligence, il fallait un être intelligent, semblable à Dieu, et c’est ainsi qu’il créa l’être humain, homme et femme, à son image, selon sa ressemblance, capable d’une réciprocité d’amour. Mais l’homme, marqué par ses fragilités, par ses peurs, par ses propres replis, ne pouvait correspondre au projet de Dieu sans le secours de la grâce, sans que le Fils de l’Homme ne lui ouvre les portes de la vie divine. Et c’est ainsi que l’Incarnation du Verbe, inaugurée depuis la Création du monde, s’est déployée encore à travers l’Alliance avec un peuple capable de l’accueillir plus encore : le peuple d’Israël. Et de ce peuple est finalement née une jeune femme capable d’accueillir en son sein le Verbe de Dieu.

Accomplissement en Marie !

Ce qui se joue dans le récit de l’annonce à Joseph, c’est donc bien cet accomplissement de l’Incarnation du Verbe de Dieu à travers le peuple d’Israël. Le passage que nous méditons en ce jour est précédé du récit de la généalogie de Jésus, depuis Abraham jusqu’à Joseph : quatorze générations d’Abraham à David, quatorze générations de David à l’exil à Babylone et quatorze générations de l’exil à Babylone jusqu’à Jésus de Nazareth. Matthieu, qui s’adresse à des judéo-chrétiens, insiste tout au long de son évangile sur l’accomplissement des prophéties du Premier Testament : Jésus de Nazareth est bien le Messie attendu, il est bien fils d’Abraham, fils de David, car c’est Joseph qui, en lui donnant son nom, l’intègre dans cette lignée. Joseph, s’il n’est pas le père biologique, comme on dirait aujourd’hui, est bien le père légal de Jésus. Or ce Messie ne sera pas un chef militaire, libérateur de l’oppresseur, comme l’espérait un grand nombre, mais le Verbe fait chair, Celui qui nous ouvre la voie vers l’accomplissement du projet de Dieu : Celui qui va permettre à l’être humain de passer de ce niveau terrestre de vie à une vie de communion avec Dieu.

Accomplissement en nous !

L’Incarnation du Verbe, qui a donc commencé depuis la Création du monde, puis s’est réalisée en Jésus de Nazareth, doit encore se poursuivre en chacun de nous : « Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne Dieu » comme le résument si bien les pères orientaux. Ainsi, l’accomplissement de l’Incarnation n’est pas dernière nous mais devant nous ! Il s’agit de permettre au Verbe d’habiter en nous, or c’est bien ce qu’opère en nous chaque eucharistie, ainsi que toute la vie sacramentelle : ils nous permettent de nous laisser configurer au Christ. Voilà donc la joie profonde qui doit habiter nos fêtes de Noël : le monde a un sens, le mal n’a pas le dernier mot, le Verbe est en train de prendre chair depuis la fondation du monde, de façon à mener chacun d’entre nous, et toute la Création, à sa plénitude ! C’est à la fois une joie profonde, et un appel à nous laisser configurer jour après jour au Christ.

En ce temps des fêtes, quels gestes de solidarité, de fraternité, d’amour, vais-je poser pour avancer vers l’accomplissement de mon être en Dieu ?

Oui, à Noël, le projet de Dieu pour l’humanité s’accomplit,

Oui, à Noël, Marie donne chair au Verbe de Dieu,

Oui, à Noël, nous célébrons l’accomplissement possible de notre vie en Dieu !

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3 réponses à Accomplissement !

  1. KIENTEGA REMI dit :

    L’Accomplissement du projet de Dieu: c’est la bonté de Dieu envers sa créature jusqu’à en créé à son image. En nous créant, il nous donne la capacité de nous édifier, de nous construire, de nous croître afin de lui ressembler. L’effort de la vie baptismale est de devenir à la ressemblance de Dieu. Saint Matthieu »Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait »(Mt 5,48) , ce veut dire d’être parfait dans la plénitude de l’humanité tel que Jésus nous l’a enseigné.
    L’Eglise est en attente du Seigneur, et toute l’existence chrétienne est en attente, qui est une attente active et non passive. Et la Vierge Marie, par son oui a compris les cris de cœur du monde en détresse. Avant de concevoir le Christ dans son corps, elle l’a conçu d’abord dans son cœur disait St Augustin. Alors, pouvons-nous être attentif à l’accueil de cet enfant si fragile, si faible avec un cœur compatissant, un cœur d’amour, un cœur de miséricorde envers les pauvres et les malades, les abandonnés et les prisonniers, les victimes de guerre… ainsi nous accueillerons l’Emmanuel dans la joie parce que ces personnes délaissées fêterons eux aussi dans la joie.
    « Viens Emmanuel, viens parmi nous. Viens Emmanuel, viens nous sauver. »

  2. Daniela et Christian dit :

    C’est vraiment l’apothéose, tu as déjà ouvert le champagne pour Noel.
    Je sais que ce n’est pas le genre de commentaire que tu aimes, mais c’est ça.

    Après une méditation pareille, comment Noel pourrait ne pas être Joyeux.

    Daniela et Christian

  3. Monique dit :

    J’aime assez, P. Benoît que vous traduisiez le mot « logos » par « avec une logique, avec un sens…». Trop souvent on réduit ce mot grec au sens étroit de « raison », mais surtout de raison « calculante » – ou abstraite, dirions-nous. Avec ça, vous faites intervenir une finalité dans la création, dans le monde concret. Parler comme ça à Noël, avouez que c’est étonnant – d’autant plus que la finalité, c’est une chose dont on ne veut plus entendre parler de nos jours. – – Bêtement, il me semble, parce qu’il n’y a qu’à regarder un peu pour s’apercevoir qu’« il y a » une finalité dans la nature et dans tout ce que nous nommons la Création. Et dans tous les projets des hommes, dans toutes ses entreprises…

    J’aime aussi dès lors que vous disiez que Noël nous rappelle que cette finalité, rendue manifeste par l’incarnation du Verbe (logos), est encore et toujours agissante en chaque humain. Que c’est un « aller vers ». Au fond vous dites que cette finalité, ce sens, n’agit pas comme s’il y avait eu, au « commencement », une élégante et désinvolte chiquenaude de la part de Dieu, mais vous dites que cette fin se trouve par Lui inscrite en nous, comme une nature… Comme un désir, peut-être ? Je dis « désir » parce que vous dites : « Et c’est ainsi qu’il créa l’être humain, homme et femme, à son image, selon sa ressemblance, capable d’une réciprocité d’amour. » Or quand on parle d’amour, on parle de désir, non ? Et de manque. Et de pauvreté, de vulnérabilité. Tout à l’image de cet Enfant de Noël, figure même de la vulnérabilité…

    Toutefois, quand vous dites qu’il faut être assez dociles pour se laisser « mener, chacun d’entre nous, à l’instar de toute la Création, à notre plénitude » – au fond pour que s’accomplisse notre raison d’être (« logos ») -, il faut que j’aie une foi solide pour m’abandonner ainsi ; non ? Là réside la joie, dites-vous. Alors là, ne faut-il pas faire un grand saut dans le vide ? Wow, la joie est difficile ! !

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