« Je ne le connaissais pas… »

19 janvier 2014, 2ème dimanche du temps ordinaire, année A, Jn 1,29-34 /

« Je ne le connaissais pas… mais j’ai vu l’Esprit descendre sur lui. » (Jn 1,31-32) On peut s’étonner de cette remarque de Jean-Baptiste car, dans notre imaginaire et dans nombre de tableaux classiques, on imagine les deux cousins jouant ensemble et se connaissant bien… Faut-il interpréter cette remarque comme l’affirmation qu’ils ne se connaissaient pas du tout et que Jean-Baptiste et Jésus ne s’étaient plus croisés depuis la fameuse rencontre via les seins maternels de Marie et d’Elisabeth ? Ou faut-il comprendre que, bien que se côtoyant comme cousins, Jean-Baptiste ne connaissait pas vraiment l’identité profonde de Jésus, jusqu’à ce que l’Esprit Saint le lui révèle comme étant « l’Agneau de Dieu », le « Fils de Dieu » ? Cette deuxième hypothèse paraît plus probable car, même si les deux familles vivaient éloignées l’une de l’autre, les pèlerinages à Jérusalem offraient déjà de nombreuses occasions de se retrouver. Mais surtout, cela rejoint et interroge nos propres expériences : comment reconnaître en Jésus le Fils de Dieu sans l’aide de l’Esprit Saint ? Et encore, comment connaître en profondeur nos frères et sœurs que nous côtoyons au quotidien sans le regard de la foi ?

Comment reconnaître en Jésus le Fils de Dieu ?

Reconnaître en Jésus cette vérité que je cherche…

Le témoignage de Jean-Baptiste est plein d’enseignements : d’abord c’est un chercheur de Dieu et de vérité, qui, à partir de ce qu’on lui a enseigné de la religion, veut vivre avec exigence et radicalité son amour de Dieu et son amour de la Loi : il vit au désert une vie ascétique, prêche la conversion, et offre un baptême de purification. Sa version de la pratique religieuse est assez éloignée de celle de Jésus… Lui ne vit pas au désert, mange avec tous (si bien qu’on le traite de glouton), et il côtoie les impurs ! Ce n’était donc pas une évidence, pour Jean-Baptiste, de voir en lui le Messie de Dieu ! Ne rejoint-il pas en cela bien des attitudes de nos contemporains : ils se font une certaine image de Dieu, de sa toute puissance, de sa bonté, de sa perfection et ils constatent un monde loin d’être parfait, un Dieu qui ne semble pas intervenir pour arrêter les conflits, qui semble rester sourd à nos prières, sans parler de cette Église de pécheurs qui est loin d’être parfaite… Comment voir alors, en Dieu, le Dieu bon et créateur de toute chose ? Comment voir, en Jésus Christ, le Sauveur du Monde ? Comment voir, en l’Église, le lieu qui me permettra de vivre mieux ? Jean-Baptiste, cependant, va se laisser déplacer : «  Je ne le connaissais pas, mais celui qui m’a envoyé baptiser dans l’eau m’a dit… » (Jn 1,33). C’est-à-dire : « Celui en qui j’ai mis ma confiance, Celui en qui j’ai fondé ma vie, me dit que c’est le Fils de Dieu »… Cette conviction ne vient pas de lui-même mais de sa proximité avec le vrai Dieu ! On pourrait donc traduire que, si nous sommes en recherche de vérité, en connexion avec le Vrai, une voix intérieure, une intuition profonde, nous laisse entendre que Jésus est le Fils de Dieu ! Ou, du moins, que de s’intéresser à Jésus peut éclairer notre quête…

Reconnaître en Jésus, l’Esprit de Dieu qui m’habite…

Le deuxième élément qui va emporter l’adhésion de Jean-Baptiste, c’est la descente de l’Esprit de Dieu sur Jésus : «  J’ai vu l’Esprit descendre du ciel comme une colombe et demeurer sur lui. » (Jn 1, 32). Autrement dit, au-delà de l’aspect miraculeux de cette descente de l’Esprit, il reconnait, en Jésus, quelqu’un qui agit selon l’Esprit de Dieu… Ce même Esprit qui inspire sa propre vie… Comment, alors, reconnaître en Jésus le Fils de Dieu,  sans laisser l’Esprit faire son œuvre en nous ? Si je cherche à vivre sous l’Esprit de Dieu, sous le souffle de Dieu qui caractérise mon humanité – « Le Seigneur Dieu insuffla dans ses narines le souffle de vie, et l’homme devint un être vivant. » (Gn 2,7) –, alors je ne peux que reconnaître, en Jésus, ce même Esprit qui m’habite ! Cet Esprit qui me souffle : « Jésus est le Fils de Dieu, le Sauveur du Monde, ton passé et ton avenir, l’Alpha et l’Omega ! »

Comment connaître en profondeur nos frères et sœurs sans le regard de la foi ?

Ce récit nous révèle encore autre chose : Jean-Baptiste ne connaissait pas vraiment Jésus, tant que l’Esprit de Dieu ne l’avait pas éclairé sur sa véritable identité ! Ainsi, nous côtoyons des frères, des sœurs, des parents, des amis mais sans vraiment les connaître… Et parfois, nous en faisons l’expérience, ils nous surprennent : « Je ne le connaissais pas ! ». N’enfermons donc jamais ceux que nous croyons connaître, dans le peu que nous avons pu découvrir d’eux, mais laissons l’Esprit de Dieu guider notre regard pour approcher de leur véritable identité, qui n’est, fondamentalement, rien d’autre que celle d’être fils et filles de Dieu !

Comme Jean-Baptiste, laissons-nous déplacer…

L’Esprit de Dieu dit à notre esprit :

« Jésus Christ est le Fils de Dieu, le Sauveur du monde !

Ton prochain est foncièrement enfant de Dieu ! 

Les connais-tu vraiment ? »

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4 réponses à « Je ne le connaissais pas… »

  1. KIENTEGA REMI dit :

    J’ai lu avec intérêt votre message hebdomadaire sur le blog Benoît. Belle vision, belle réflexion et surtout et toujours orientée sur l’actualité.
     » Je ne le connais pas ». J’ai constaté une attitude d’humilité, de simplicité et surtout de vérité de la part de Jean-Baptiste. Connaître, c’est dire qu’on sait ; et savoir, c’est avoir une connaissance sur quelqu’un ou quelque chose. Alors, on cherche à affirmer ou confirmer par des preuves qui tiennent sur ce qu’on ignore. Jean-Baptiste a laissé paraître une sincérité : « je ne le connais pas ». Pour que l’Évangile s’étende jusqu’aux extrémités de la terre, il faut des hommes qui acceptent de dire comme J-B ou Socrate:  » tout ce que je sais, sais que je ne sais rien ». Prise de conscience de sa propre ignorance qui n’est rien d’autre que la simplicité en toute chose. C’est Dieu qui est le maître et la mesure de toute chose et toute vraie connaissance ne peut être humaine, mais elle est suscitée par le Saint Esprit; cela nous aide à être proche du peuple de Dieu sans juger car Dieu seul est maître de toute justice. Comme dit le psalmiste, ouvrez les portes éternelles afin que le roi de gloire puisse entrer. » Et qui est ce Roi de gloire, c’est le Seigneur, le très haut ». Pour moi, non seulement, c’est le Seigneur, mais il est aussi mon prochain; qui est mon frère, ma sœur. Sans distinction de race, ni de culture, ni de religion, mon prochain est le Christ vivant en moi, au plus secret de mon cœur et qui me demande d’être un homme de communion, d’unité, de paix et de justice. Voilà, cet homme qu’est J-B nous donne ce message fort aujourd’hui. Cultiver la richesse dans la diversité et accepter l’autre dans sa fragilité; avec honnêteté et charité: « il faut qu’il grandisse et que moi, je diminue ». Qu’il en soit ainsi.

  2. Paul dit :

    « Je ne Le connais pas » nous dit saint Jean-Baptiste.
    Oui cette affirmation novatrice et surprenante de saint Jean-Baptiste dit tout de la Révélation et montre le visage du Dieu qui s’incarne. En regardant l’univers, c’est une folie de penser et de croire que Dieu en venant dans le monde a pris le visage de notre pauvre humanité. D’ailleurs déjà annoncé dans le livre de la genèse : « Faisons l’homme à notre image ». Quel étonnant et déroutant message au monde, et pourtant vrai : Dieu a pris le visage de l’homme ! N’est-ce-pas Le Messie que les chrétiens annoncent ? Mon prochain est le visage même de Dieu. Alors ma question serait toute simple : Aujourd’hui dans notre monde ravagé par toute sorte de violences où on a faim de fraternité et que tout est à reconstruire, quel Dieu vient à l’idée quand je regarde le visage d’autrui ? Fraternellement Fr Paul

    • Monique dit :

      La question de fr Paul est très intéressante et dynamique. Elle s’apparente à celle d’Augustin qui demande « Quels visages a donc l’amour ? » En fait, la première idée qui me vient est de renverser la question de Paul : « Quel, ou quels visages a donc Dieu ? » Dieu alors aurait le visage d’autrui, de mon proche, de mon ami… et de celui qui s’afforce d’être mon ennemi en grimaçant ? La réflexion de Fr Paul m’amène à dire qu’il faut peut-être s’entraîner, délibérément, à voir le visage de Dieu dans chaque visage humain. Car enfin, l’humanité aussi est incarnée, elle l’est en chacun des humains. Elle ne flotte pas dans un monde séparé, n’en déplaise à Platon. Elle est concrète, l’humanité.

      Le défi est immense quand cet humain est mon ennemi, justement. Comme si l’on était invités à voir Dieu au-delà des apparences. L’homme est plus que ses colères, ses méchancetés, ses mesquineries, sa violence. Mais allez donc être convaincu de ça en présence de ce voisin qui me casse les pieds ! Il est remarquable de dire que chaque visage humain « est » le visage de Dieu, mais est-ce qu’il est possible de le penser ? Nous nous arrêtons normalement à l’écorce ; qui peut croire que ça n’est qu’une écorce ? Et pire, qui va être certain que derrière l’écorce, il y a… Dieu ? Dieu aimerait-il se cacher sous un masque ?

  3. SOCRATE KIENTEGA dit :

    L4OPTIMISME EST LE POINT FOCAL DE LA PERSEVERENCE

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