Se libérer de notre peur du jugement !

109D15 mars 2015, 4e dimanche de carême, année B, Jn 3,14-21 /

Pourquoi la peur du jugement traîne-t-elle en nos têtes malgré 2000 ans de christianisme ? Les textes de ce jour sont pourtant très explicites : « Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. » (Jn 3,17) Dieu ne veut pas récompenser nos mérites mais nous offrir en cadeau… gratuitement… par grâce… la vie éternelle : « C’est bien par la grâce que vous êtes sauvés, et par le moyen de la foi. Cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. Cela ne vient pas des actes : personne ne peut en tirer orgueil. » (Ep 2,8-9) Est-ce dans les profondeurs de notre rapport au sacré que cette peur du jugement est inscrite ? Est-ce par notre fonctionnement psychologique que nous projetons en Dieu cette peur du jugement ? Est-ce dû aux prédicateurs d’hier et d’aujourd’hui qui préfèrent jouer sur cette corde sensible pour avoir des ouailles plus dociles et plus motivées ? Je pense qu’effectivement tout ceci, à divers degrés, joue dans cette logique difficilement déracinable des mérites récompensés ou des fautes sanctionnées. Rappelons-nous pourtant le « bon larron », nullement méritant, ni repentant, mais reconnaissant, en Jésus, le Sauveur : « « Jésus, souviens-toi de moi, lorsque tu viendras inaugurer ton Règne ». Et il lui dit : « En vérité, je te le dis, aujourd’hui tu seras avec moi dans le Paradis. »» (Lc 23,41-42)… Revisitons donc cette justice de Dieu !

Non pas pour juger mais pour sauver !

Non pas pour juger mais pour sauver ! : Comment faut-il le dire et le signifier pour que cela rentre définitivement dans nos têtes ? Venait-on à Jésus pour qu’il rende des jugements ou pour se faire guérir ? Lorsque ses opposants cherchaient à l’enfermer dans ce rôle de juge, comment se comportait-il ? Pensons à la femme adultère : « « Personne ne t’a condamnée? » … « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, désormais ne pèche plus. » » (Jn 8,10-11) Est-ce lui qui a jugé Caïphe ou Pilate, ou bien lui qui s’est laissé juger par eux ? Non ! Le jugement le voici, nous dit saint Jean : « Quand la lumière est venue dans le monde, les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs œuvres étaient mauvaises. » (Jn 3,19) La balle est dans notre camp ! Depuis toujours, Dieu nous propose un chemin de vie, et non seulement il nous le propose, mais il vient sans cesse rechercher l’homme égaré pour le remettre sur le chemin de la vie, sur le chemin de la lumière… Mais si l’homme n’en a cure, toute la tendresse bienveillante de Dieu devient impuissante !

Sauvés par grâce au moyen de la foi !

L’être humain n’a-t-il alors rien à faire pour être sauvé ? Eh bien si, il a à accepter le cadeau que Dieu lui offre ! Vous vous imaginez une rencontre familiale, ou entre amis, où l’on vous offrirait un cadeau que vous refuseriez ? Quelle douleur pour l’ami offensé ! Quelle rupture dans la relation ! Quel affront ! Or c’est ce que subit le Seigneur chaque jour ! Mais il ne peut forcer l’estime, l’amitié, l’amour… Par contre si on accepte un cadeau, nous faisons la joie de notre ami et nous manifestons par-là notre désir de grandir en communion avec lui. Eh bien la foi, c’est cela : l’acceptation du cadeau de la Vie de la part de Dieu, et cela devra se manifester par nos façons d’être, à notre tour, source de vie autour de nous. Notre vie morale, sociale, familiale sera alors un débordement de la vie reçue gratuitement de la part de Dieu. C’est ce qu’explicite le texte fondamental, de 1998, d’accord entre luthériens, méthodistes et catholiques, sur la doctrine de la justification : «Nous confessons ensemble que les bonnes œuvres – une vie chrétienne dans la foi, l’espérance et l’amour – sont les conséquences de la justification et en représentent les fruits. Lorsque le justifié vit en Christ et agit dans la grâce reçue, il porte, en termes bibliques, de bons fruits. Cette conséquence de la justification est pour le chrétien, dans la mesure où il lutte tout au long de sa vie contre le péché, une obligation qu’il doit remplir; c’est la raison pour laquelle Jésus et les écrits apostoliques exhortent les chrétiens à accomplir des œuvres d’amour. »

Le jugement, une seconde chance !

Saint Jean nous dit encore : « Celui qui croit en lui échappe au Jugement, celui qui ne veut pas croire est déjà jugé, parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu. » (Jn 3,18) Ici,  saint Jean nous dit qu’il n’y a pas de jugement et que tout dépend dès maintenant de notre foi au Christ, de notre adhésion à Lui ! J’emploie à dessein adhésion à Lui, car on peut prétendre croire au Christ alors que nos œuvres manifestent le contraire… Ou encore on peut sembler refuser le Christ alors que nos œuvres vivent de son amour ! Ce n’est donc pas ici un clivage chrétiens ou non-chrétiens, mais vie christique ou vie non christique si je puis m’exprimer ainsi ! Mais encore faudrait-il compléter la citation de saint Jean par une autre plus encourageante : « Tous ceux qui sont dans les tombeaux vont entendre sa voix, et ils sortiront : ceux qui ont fait le bien, ressuscitant pour entrer dans la vie ; ceux qui ont fait le mal, ressuscitant pour être jugés. » (Jn 5,28-29) Ici le jugement apparaît comme une seconde chance offerte à ceux « qui ont fait le mal », non ?

Donc rassurons-nous : Dieu ne veut pas nous juger mais nous sauver !

La balle est dans notre camp : accepterons-nous sa main tendue ?

Et remettrons-nous notre confiance en son amour et sa miséricorde infinie ?

 

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