Qu’attendons-nous de Dieu ? Qu’attendons-nous de l’Église ?

pecheresse412 juin 2016, 11e Dimanche ordinaire, année C, Lc 7,36-8,3 /

Un pharisien invite Jésus à sa table, et voici que celui-ci se laisse approcher par une pécheresse, supposément une prostituée ! Le pharisien s’indigne et se ferme à l’identité réelle de Jésus, la pécheresse pleure de joie et obtient le salut ! Ces deux attitudes nous posent alors une vraie question : qu’attendons-nous de Dieu, qu’attendons-nous de l’Église ? Qu’ils soient miséricordieux ? Pas si sûr… Une publication récente sur Facebook m’a attristé et fait sourire car on croirait une actualisation directe de notre passage d’Évangile. Savez-vous la grande affaire qui inquiète les membres de la fraternité sacerdotale Saint Pie X (Les schismatiques de Mgr Lefebvre qui ne reconnaissent ni le concile Vatican II, ni le magistère des papes depuis Jean XXIII) ? Que le pape François ne se soit pas agenouillé, mais seulement incliné, devant le Saint Sacrement exposé lors de la Fête du Saint Sacrement ! Alors que, argumentent les intégristes, il n’a pas de problème de genoux puisqu’il se met à genoux pour laver les pieds de prisonniers, de migrants et même de non chrétiens, lors du Jeudi Saint ! Ne retrouve-t-on pas là exactement les mêmes ingrédients que dans notre passage d’Évangile ? Qu’attendons-nous de Dieu ? Qu’attendons-nous de l’Église ?

Qu’elle défende notre identité, nos rites et nos valeurs ?

« Si cet homme était prophète, il saurait qui est cette femme qui le touche, et ce qu’elle est : une pécheresse. » (Lc 7,39) Le pharisien a donc, semble-t-il, invité Jésus à sa table pour le tester, pour voir d’un peu plus près ce Jésus dont tout le monde parle et se faire une opinion sur lui. S’il est prophète il doit certainement avoir un comportement pur et sans reproche, respectant toutes les règles de la religion et être édifiant par son zèle religieux. Or voilà, qu’au contraire, Jésus se laisse toucher par une pécheresse, devenant lui-même impur dans la logique du pharisien. Non, décidemment, Jésus ne correspond pas à ce que le pharisien en attendait et celui-ci devient incapable de reconnaître en lui ne serait-ce qu’un prophète et encore moins le Fils de Dieu… Et nous ? Ne risquons-nous pas de fonctionner comme ce pharisien ? Pour se faire une opinion du pape François, ou de tout autre homme de Dieu, va-t-on prêter attention à son observance extérieure des rites et des règles : ses agenouillements, ses paroles fidèles au missel, ses yeux levés au ciel quand il prie ? Va-t-on attendre de lui qu’il défende notre identité, nos rites, nos valeurs ? Ou qu’il témoigne d’une vie évangélique ? Le frère Adrien Candlard, o.p., dit bien cela : « On peut se battre contre l’euthanasie parce que vivre dans une société qui tue ses pauvres et ses vieux est insupportable. On peut aussi le faire pour de mauvaises raisons, en se disant : ‘Les chrétiens risquent de perdre du terrain.’ Ce n’est pas tout à fait la même démarche. […] En tant que chrétiens, je ne crois pas que nous soyons appelés à être les gardiens de musée de la civilisation européenne. Nous sommes-là pour annoncer le Christ mort et ressuscité, pas pour défendre une identité. »[1]

Qu’elle récompense les pieux et les bien-pensants ?

« Ta foi t’a sauvée. Va en paix ! » (Lc 7,50) La pécheresse, contrairement au pharisien a perçu tout de suite que Jésus l’accueillait avec amour et miséricorde. Car si l’on comprend bien, dans la logique du récit, la parole de Jésus : « Celui à qui on pardonne peu montre peu d’amour. » (Lc 7,47), cela signifie que les pleurs de la pécheresse et ses gestes d’amour envers Jésus étaient déjà des pleurs de joie et des gestes d’action de grâce, pour l’accueil inconditionnel de Jésus et pour son pardon. Avant qu’il ait dit une seule parole, elle s’est sentie aimée et pardonnée. Dieu ne vient donc pas récompenser ou punir les justes ou les pécheurs mais offrir son amour à tous. Il s’était laissé inviter par le pharisien, il avait posé un regard d’amour sur le jeune homme riche observant la loi, il ne s’adressait pas qu’aux pauvres et aux pécheurs, mais ceux-ci semblent plus disposés à reconnaître leur besoin de Dieu, de sa miséricorde et de son amour, que les riches, les pieux et les bien-pensants. Ne faisons donc pas de notre religiosité un droit d’entrée au paradis, mais utilisons-la pour creuser notre désir de Dieu, de sa miséricorde, de son amour.

Qu’elle manifeste l’infinie miséricorde de Dieu ?

« La miséricorde est le propre de Dieu dont la toute-puissance consiste justement à faire miséricorde». (St Thomas d’Aquin, cité par le pape François dans Misericordiae Vultus, n° 6) Nous l’avions signalé au début de notre année liturgique C, nous cheminons avec l’évangile de Saint Luc, l’évangéliste de la miséricorde. Tant que nous ne recherchons pas la miséricorde de Dieu pour nous-même et à être témoin de sa miséricorde pour tous, nous ne serons jamais sur le chemin du salut ! Il n’y a donc qu’une chose à attendre de Dieu : sa miséricorde… et qu’une chose à attendre de l’Église qu’elle soit toujours plus miséricordieuse comme le Père. Si le mot miséricorde, pourtant très riche, vous fait peur on peut dire aussi que nous n’avons qu’à attendre l’amour inconditionnel de Dieu et à manifester cet amour inconditionnel en Église. Dieu merci, le pape François nous le rappelle sans cesse, qu’il soit debout devant le Saint sacrement ou agenouillé devant un prisonnier, un migrant, une fille mère…

Quelle attitude sera la nôtre, celle du pharisien ou de la pécheresse ?

Qu’attendons-nous de Dieu ?

Qu’attendons-nous de l’Église ?

 

[1] Cf. Entretien avec le Fr. Adrien Candlard dans Le Pèlerin du Jeudi 2 juin 2016

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3 réponses à Qu’attendons-nous de Dieu ? Qu’attendons-nous de l’Église ?

  1. Thérèse L.-Vézina dit :

    Qu’importe la longueur de la lettre « hebdomadaire », chaque page laisse des traces.

  2. Michelle dit :

    Intéressant de donner un vrai sens au geste posé plutôt de juger la bonne attitude. Je ne sais pas si plusieurs pensent à l’inverse de la question : qu’esr-ce que Dieu attend de moi, sa créature bien-aimée. Théologiquement, Dieu m’a donné ce qu’il faut pour Être. Etre digne de Lui, soucieuse d’avoir recours à ses dons. Quant à l’Eglise, j’ai pensé : c’est moi l’Eglise et vous tous qui me lisez. Qu’est-ce que vous attendez de moi en tant que chrétienne, en tant qu’humaine, créature Membre de ce grand corps ? L’Église institution, qu’est-ce que j’y peux ? Elle attend tout d’elle ! Elle nous exhorte, nous réglemente, nous interdit, nous conseille ….Elle me semble bien loin de Jésus qui insiste sur les Heureux les pauvres, les assoiffés de justice, les doux, les humbles, celle qui parfume, etc. Suis-je dans la bonne Voie, si je me questionne sur ma communauté en disant : qu’attendez-vous de moi ? Qu’attendez-vous de vous ? Oh, oui, on aime bien citer le pape Frcs mais malgré lui ou sans lui ou avec un autre, la vraie et éternelle question quelle serait-elle ? Est-ce que je lave les pieds de mes contemporains ? Mon regard voit-il la dignité de celui ou celle devant moi ? Comme la femme de l’Evangile !
    Pas facile, hein ?

  3. Daniela et Christian Sacy dit :

    S’il m’était donné d’être à la place de Jésus, 99% des décisions qu’il a prises je ne les aurais pas choisies. « Mes pensées ne sont pas les siennes » Dieu merci!!! Il n’a pas fini de nous surprendre.
    IL ne calcule pas comme nous:`Les justes’ selon nos critères IL les renvoie les mains vides. Dans l’Évangile d’aujourd’hui, je m’identifierais plus au pharisien qu’à la pécheresse. De même pour l’Évangile du fils prodigue où celui des ouvriers de la troisième heure.
    C’est vraiment le ‘Tout autre’

    HEUREUSEMENT QU’IL EST MISÉRICORDIEUX

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