4 septembre 2011, 23ème dimanche A, Mt 18,15-20 /
Le passage d’évangile de ce dimanche, où Jésus nous explique les différentes étapes à suivre pour la correction fraternelle, n’est-il qu’un simple recueil pratique sur la meilleure façon de procéder ? Peut-être pas… La sentence centrale ouvre un tout autre horizon : « tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel et tout ce que vous aurez délié sur la terre sera délié dans le ciel. » (Mt 18,18) N’est-il pas principalement question de notre responsabilité personnelle et de notre responsabilité collective pour que l’œuvre de libération, opérée par Dieu lui-même, puisse pleinement advenir ?
Responsabilité personnelle
« Si ton frère a commis un péché… » Jésus n’évoque pas un différent personnel ni un conflit à résoudre. Il ne dit pas : « si ton frère a commis un péché contre toi », mais évoque un péché en soi qui, a priori, ne me concerne pas personnellement. Cela induit une lecture très différente, peut-être, de celle que nous pourrions avoir au départ. Il en va essentiellement de notre responsabilité face à un frère, déjà disciple du Christ, qui emprunte un chemin de non-vie ! Jésus nous invite à ne pas rester indifférent face à ce frère mais à le remettre sur le chemin de la vie. Et c’est vrai que cela demande un certain courage pour aller trouver ce frère au risque d’être renvoyé à son propre péché. Et Jésus d’insister : « s’il ne t’écoute pas, prends encore avec toi une ou deux personnes » et si cela ne suffit pas « dis-le à l’Église »… À y regarder de près, toute cette démarche, n’a pas que pour but de tout mettre en œuvre pour sauver le frère, mais c’est aussi une manière de vérifier si ce que nous estimons être un péché, chez notre frère, est objectivement un péché suffisamment grave pour que des frères soient pris à témoin, et pour que la communauté chrétienne elle-même en soit informée. Tout au long de la démarche, il en va de ma responsabilité personnelle éclairée par une responsabilité collective. Si je n’ose pas dire à la communauté ce que j’aurais envie de dire au frère peut-être est-ce parce que mon jugement est trop partial. Envisager jusqu’où la démarche peut nous conduire -devant l’Église- me permettra de trouver l’attitude juste pour parler à ce frère. Ce n’est que dans l’humilité, et dans la conscience de ma responsabilité de disciple face à un autre disciple du Christ, qui objectivement se perd, qu’une telle démarche peut et doit être faite !
Responsabilité collective
« Ce que vous aurez lié… ce que vous aurez délié… » Ce fameux « pouvoir des clefs » n’est pas ici remis uniquement à Pierre ou aux apôtres mais est confié collectivement aux disciples. Certes, une responsabilité particulière est confiée « à l’Église » et à ses ministres en dernier ressort –comme nous venons de le lire– notamment en ce qui concerne le sacrement de la réconciliation, mais cela n’enlève rien à la responsabilité collective qui consiste à faire advenir le salut pour tout être humain, à le libérer de ses entraves, à lui ouvrir le chemin de la vie. Et c’est dans ce contexte qu’il faut entendre la suite du texte : « Encore une fois, je vous le dis, si deux ou trois se mettent d’accord pour demander quelque chose, ils l’obtiendront de mon Père. » La demande évoquée n’est pas de n’importe quel type mais elle est ordonnée à ce travail de libération. Si deux ou trois s’accordent pour proposer le pardon à un frère, pour dénoncer une injustice, pour lutter contre les œuvres de mort, pour libérer les exploités, alors Jésus nous assure que Dieu sera à leur côté. La libération du péché ne se joue pas que dans le sacrement de la réconciliation. Tous nos engagements au service de la dignité humaine, de la paix, de la justice participent de l’unique œuvre de salut opérée par Jésus Christ, si tant est qu’ils soient authentifiés par la communauté chrétienne.
Sous la responsabilité de Dieu
Oui, c’est bien le Père qui porte, de façon existentielle, le souci d’offrir sa vie à tous les humains. Or toute l’histoire du Salut aboutit à cette remise entre les mains des disciples de l’œuvre de son Fils. Aussi, lorsque le Christ affirme sa présence aux deux ou trois qui se réunissent en son nom, ce n’est pas pour justifier la démultiplication de micro-églises. Mais, sans sortir cette sentence de son contexte, nous pouvons entendre que c’est bien l’œuvre puissante de libération réalisée par le Christ lui même qui peut s’opérer dès que deux ou trois se mettent d’accord, et agissent ensemble au service du Royaume de Dieu ! Quand des disciples du Christ s’engagent, c’est le Corps du Christ ressuscité qui est engagé. Quand nous nous sentons personnellement et collectivement responsable de nos frères, c’est bien la responsabilité même de Dieu, pour la vie de tous les humains qui est engagée ! Lorsque nous libérons des frères de leurs entraves, c’est bien Dieu lui-même qui peut agir à travers nous !
Responsabilité personnelle, responsabilité collective,
pour que Dieu lui-même puisse libérer et sauver
Quelle responsabilité !
J’ai la responsabilité de me pardonner et de pardonner à mon prochain parce que c’est la plus grande délivrance qui soit.
Quelle responsabilité !
Il me faut compter sur l’action de l’Esprit du Seigneur pour gérer « dans l’humilité » ma responsabilité personnelle et collective et espérer en arriver un jour à cette
« délivrance » dont parle Denise R.
Merci à mes éclaireurs ! TLV