6 novembre 2011, 32ème dimanche A, Mt 25,1-13 /
Cette parabole des « vierges sages et des vierges folles » a déjà fait consommer beaucoup
d’encre, de peinture et même de débris de pierre puisque, outre les commentaires des Pères de l’Église et des prédicateurs au long des siècles, les artistes eux-mêmes se sont emparés de cette parabole pour en faire des vitraux, des pièces de théâtre ou des portails entiers de cathédrale ! Je ne peux en effet m’empêcher de me remémorer ce portail sud de la cathédrale de Strasbourg, où les cinq vierges insensées sont flanquées du tentateur tandis que les cinq vierges sages sont accueillies par le Christ lui-même. Cette parabole donc, pas si simple, a suscité de nombreuses interprétations. Par exemple chez St Augustin, les cinq vierges peuvent représenter la maîtrise des cinq sens ; en vue de Dieu, pour les sages, mais uniquement en vue de la reconnaissance des hommes, pour les insensées. C’est bien le propre des paraboles d’ouvrir à des lectures multiples afin de nourrir notre foi tout au long de notre vie et de nos différents questionnements. Voici donc encore quelques pistes de lecture, parmi bien d’autres possibles : cette flamme n’est-elle pas celle remise à notre baptême ? N’est-ce pas l’huile de l’amour, l’huile de la prière et l’huile de la communauté fraternelle qui peuvent durablement l’alimenter ?
L’huile de l’amour !
Remarquons d’emblée que les dix vierges, ou les dix jeunes filles (suivant les traductions), s’en allèrent à la rencontre de l’époux ! La parabole vise donc des personnes qui connaissent le Christ et qui savent qu’un festin de noces les attend. L’introduction à la parabole est explicite : « Jésus parlait à ses disciples de sa venue ». Nous pouvons donc légitimement penser ici aux baptisés qui marchent à la rencontre du Christ. D’ailleurs Matthieu, au chapitre septième, évoque une parabole semblable en partie : « Il ne suffit pas de me dire Seigneur, Seigneur… Beaucoup me diront : « N’est-ce pas en ton nom que… »… « Je ne vous ai jamais connus ; écartez-vous de moi, vous qui commettez l’iniquité ! » (Mt 7,21…23) Une réponse semblable à celle que donne le Christ aux cinq jeunes filles insensées : « Amen, je vous le dis : je ne vous connais pas. » Il est donc clair, et peut-être trop banal, de dire que le titre de « Chrétien » ne suffit pas pour entrer dans le Royaume de Dieu. Une flamme nous a été remise à notre baptême, mais qu’en avons-nous fait ? L’avons-nous entretenue en vivant conformément à la vie du Christ et en laissant l’Esprit Saint agir en nous ? Avons-nous engagé notre vie au service de nos frères et sœurs, particulièrement les plus délaissés, les plus malheureux pour alimenter la flamme reçue à notre baptême de l’huile de l’amour ?
L’huile de la prière !
Nous le savons déjà, mais encore faut-il le redire, quelle que soit notre capacité à aimer, quelle que soit la bonté de notre vie, ce n’est pas à la force de nos bonnes œuvres que nous pourrons saisir le Royaume de Dieu. Le passage obligé, pour l’humanité entière, c’est le Christ ! Son incarnation, sa mort et sa résurrection furent nécessaires pour nous ouvrir les portes de la vie éternelle. Ce n’est que par notre participation à la vie même du Christ que nous pourrons passer de cette vie ici-bas à une vie en Dieu. Puisque notre baptême nous a déjà configurés au Christ, avons-nous pris les moyens d’entretenir, au long de notre vie, cette intimité avec le Christ inaugurée à notre baptême ? Voilà le rôle principal de la prière : laisser la vie du Christ grandir en nous, par la méditation de sa Parole, par la pratique des sacrements, par des temps de cœur à cœur avec Lui, dans le silence de l’Oraison. Pour alimenter la flamme reçue à notre baptême, utilisons-nous l’huile de la prière ?
L’huile de la communauté fraternelle !
Insensés, ou sages, croyons-nous enfin pouvoir entretenir cette flamme de notre baptême tout seul ? Oui notre baptême nous a configurés au Christ mais pas dans un seul à seul avec lui ! Cette intimité avec le Christ passe par l’agrégation à son Corps ressuscité que forme la communauté de ses disciples. Chaque membre remplissant un rôle spécifique dans ce Corps du Christ qu’est l’Église, il nous revient et de recevoir des autres chrétiens soutient pour notre marche, et d’apporter notre spécificité, nos dons à l’édification de ce Corps. Pour approfondir notre foi, pour nous soutenir dans la joie et dans les épreuves, pour inventer ensemble une charité plus effective, avons-nous recours à l’huile de la communauté ? « Quel plaisir, quel bonheur de se trouver entre frères ! C’est comme l’huile qui parfume la tête, et descend sur la barbe, sur la barbe d’Aaron, qui descend sur le col de son vêtement. » (Ps 133(132))
Alors, lorsque nous nous présenterons devant le Christ, qu’en sera-t-il de la flamme de notre baptême ? Nul autre que nous ne pourra fournir l’huile qui aura alimenté, ou non, notre vie de baptisé :
L’huile de l’amour !
L’huile de la prière !
L’huile de la communauté fraternelle !
Conscience éclairée ?
Pour la seconde fois, la «loi de la gradualité» m’est enseignée.
Merci au maître d’hier et d’aujourd’hui ! TLV
Là, vraiment, P. Benoît, vous avez tout dit ! Vous faites le tour de tous les recoins de notre expérience, de tous les plis de notre conscience, vous ne laissez rien où votre méditation « ne passe et repasse » ! !