13 novembre 2011, 33ème dimanche A, Mt 25,14-30 /
Cette fin d’année liturgique nous renvoie à un autre épilogue : celui de la fin des temps ! Sans entrer dans un catastrophisme millénariste, ne sentez-vous pas l’urgence de vous y préparer ? Car, somme toute, quelle que soit la date du retour du maître pour demander des comptes (cf. Mt 25,19), notre fin des temps, individuellement parlant, est proche : « Le nombre de nos années ? Soixante-dix, quatre-vingts pour les plus vigoureux ! Leur plus grand nombre n’est que peine et misère ; elles s’enfuient, nous nous envolons. » (Ps 89,10) À tout âge, confronté soudainement à l’imminence de la mort possible, chacun a pu se poser cette question aigüe : « Qu’aurai-je fait de ma vie ? ». La parabole des talents nous renvoie donc à une triple urgence : il est urgent de rendre grâce, il est urgent de vivre, il est urgent de prier !
Urgent de rendre grâce !
« Un homme, qui partait en voyage, appela ses serviteurs et leur confia ses biens. À l’un il donna une somme de cinq talents, à un autre deux talents, au troisième un seul, à chacun selon ses capacités. » (Mt 25,14-15) Puisqu’on va nous demander des comptes, faisons tout de suite un peu de comptabilité… Un talent équivaut à 60 mines qui chacune vaut 100 deniers, le denier étant le salaire d’une journée. Donc remettre un talent revient à remettre le salaire de 6 000 journées soit environ 20 années de salaire (puisqu’il y a des jours chômés). Le maître a donc donné à ses serviteurs de quoi subvenir à leurs besoins respectivement pour 100 ans, 40 ans et 20 ans… Ce n’est pas rien ! La parabole nous parle donc de biens qui nous sont confiés en abondance, même si nous sommes les moins nantis. Il ne faut donc pas restreindre ces « talents » aux dons personnels ou aux biens matériels qui nous sont confiés, mais prendre conscience de tout ce dont nous bénéficions et dont on nous demandera compte : la vie reçue, la santé, l’amour dont nous avons bénéficié… mais encore l’eau, la lumière, la nourriture, les forêts, les animaux, les ressources naturelles… et finalement toutes ses années déjà vécues et celles encore à vivre. N’est-il pas urgent de rendre grâce ? Non seulement de remercier oralement, mais vraiment de rendre les grâces reçues, de faire de notre vie une action de grâce : une mise en œuvre des grâces reçues…
Urgent de vivre !
Qu’aurons-nous fait de tout ceci ? L’aurons-nous gaspillé en pure perte ? (Ce qui n’est même pas envisagé dans la parabole !!!) L’aurons-nous « enfoui en terre », c’est-à-dire aurons-nous refusé d’accueillir la vie offerte par Dieu, en cherchant à vivoter avec d’autres expédients ?… D’où la sentence plutôt choquante de prime abord : « Enlevez-lui donc son talent et donnez-le à celui qui en a dix. Car celui qui a recevra encore… mais celui qui n’a rien se fera enlever même ce qu’il a. » (Mt 25, 29) La vie, en effet, ne peut être que transmission, échange, risque et non pas captation ou repli sur soi. Il est urgent de vivre, c’est-à-dire de transmettre ce que nous avons reçu, de lui faire porter du fruit, de sortir de soi, de risquer sa vie pour les autres, d’aimer. Tout le reste – repli, peur, égoïsme – relève de la non-vie, qui ne peut trouver place dans le Royaume de Dieu, dans le Royaume de la Vie : cela nous sera enlevé ! Et surtout ne soyons pas jaloux de ce que les autres auront perçu, car le maître a donné à chacun avec abondance et « selon ses capacités »… Soyons même heureux de ne pas trop avoir à faire fructifier car « à qui on aura donné beaucoup il sera beaucoup demandé, et à qui on aura confié beaucoup on réclamera davantage. » (Lc 12,48)
Urgent de prier !
J’ai pas mal hésité, pour cette troisième expression, mais voilà ce que je voudrais y dire : puisque le moment de la rencontre viendra bientôt, pour chacun d’entre nous, n’est-il pas urgent de nous préparer à rencontrer « le Maître » grâce, principalement, à la prière. Comme je le disais la semaine dernière, toute notre capacité à aimer ne nous permettra pas de saisir le Royaume, il nous faudra en passer par le Christ. Aussi il nous faut toujours tenir en même temps que notre vie en Dieu dépendra de nos actes ici-bas – le jugement – et que notre vie en Dieu sera un don gratuit de la miséricorde de Dieu. N’est-il pas urgent de prier et d’agir en ces termes : « Crois en Dieu comme si tout le cours des choses dépendait de toi, en rien de Dieu. Cependant mets tout en œuvre en elles, comme si rien ne devait être fait par toi, et tout de Dieu seul. » Gábor Hevenesi (1656-1715), jésuite hongrois (maxime habituellement attribuée à St Ignace). Ou, dans une formulation plus simple, mais peut-être moins riche : « Prie car tout dépend de Dieu, mais agis comme si tout dépendait de toi ! »
Puisque « notre » fin des temps approche… N’est-il pas :
Urgent de rendre grâce ?
Urgent de vivre ?
Urgent de prier ?
Avec l’agenda proposé, nous terminerons le mois de novembre en action de grâce pour souligner les anniversaires de celui qui a fait de sa vie « une mise en oeuvre des grâces reçues… »
À la toute fin d’un plus long parcours, la soussignée prend en considération l’urgence de préparer son envol vers l’éternité, non sans apprécier les beaux côtés de la condition humaine.
Heureux anniverssaire (s) Père Benoît ! Thérèse L.-V.
Bonjour Père Bigard,
Ordinairement, le mot « Urgence » peut causer du stress, une échéance de dernière minute, une rapidité affolée!!!!
Mais quand je lis: Urgence de rendre grâce, urgence de vivre, Urgence de prier,
Je ressens la paix et la joie de vivre mon quotidien en union avec Celui que mon coeur aime! Alléluia!
Je me tais devant ces deux très belles réactions à votre commentaire, P. Benoît !