Méfions-nous de nos réactions spontanées !

5ème dimanche de carême, année C, Jn 8,1-11 /

Quel effroi de réaliser que cette histoire de lapidation, pourtant vieille de deux mille ans, demeure toujours criante d’actualité ! Les lapideurs, coupeurs de membres et autres fouetteurs, au nom de Dieu, ressurgissent du fond des ténèbres humaines… Chacun de nous condamne bien sûr cette barbarie, mais quels sont donc les ressorts à l’œuvre dans cette noirceur humaine ? En sommes-nous tout à fait exempts ? Scrutons de près nos réactions, relèvent-elles résolument de l’attitude de Jésus de Nazareth : « Je ne te condamne pas. Va et désormais ne pèche plus ! »  ou de notre spontanéité trop humaine : « éliminons ces parias, ces dépravés, ces immoraux » ?

Condamner ou relever ?

Dans les méandres du psychisme humain, depuis notre plus tendre enfance, se logent des désirs de perfection, de pureté, de toute puissance, accompagnés de leur lot de culpabilité, de manque d’amour, de blessures profondes… Certains pensent alors ne pas être aimables puisqu’imparfaits… et de projeter alors cette logique dans leur rapport à Dieu : « pour que Dieu m’aime, m’apprécie, m’envoie des bienfaits, je dois être parfait ! » Et encore « pour que mon peuple bénéficie des bienfaits de Dieu, il doit être purifié de toute souillure, de toute impureté, de toute immoralité ! » Et naissent alors les petits et les grands despotes de la moralité ! Or, c’est toujours une fausse image de Dieu qui est à l’origine de ces déviances sectaires… Dieu n’a pas besoin que nous soyons parfaits pour s’approcher de nous, bien au contraire, c’est particulièrement des pécheurs qu’il veut s’approcher pour les relever et les remettre sur le chemin de la vie ! « Je ne te condamne pas. Va et désormais ne pèche plus ! » Quel regard portons-nous sur nos frères ? Celui des despotes moralisateurs au nom de Dieu, ou celui du vrai Dieu qui veut relever celles et ceux qui tombent ?

Utiliser ou servir l’autre ?

Un autre trait de ce texte est particulièrement navrant, c’est l’utilisation de cette femme, comme d’un objet, afin de pouvoir piéger Jésus dans sa supposée rébellion à la Loi de Dieu : « Ils parlaient ainsi pour le mettre à l’épreuve, afin de pouvoir l’accuser. » La situation de cette femme ne préoccupe nullement ses accusateurs ! Ils veulent défendre leur idéologie, et sont prêts à supprimer des vies pour atteindre leur but. Nous ne connaissons que trop ces tristes régimes qui n’ont pas hésité à éliminer des millions de vies pour défendre leur vision du bien ! Or, malheureusement, la défense de nos idées peut nous amener à cette même logique : ne pas prendre en compte les personnes et les sacrifier sur l’autel de nos principes. N’avez-vous pas noté, a contrario, que ce qui a habituellement fait bouger certaines personnes sur leur acceptation –ou au moins sur leur prise en compte- de l’homosexualité, par exemple, c’est d’avoir été confrontées à cette question à travers un de leurs proches ou de leurs amis ? Les grands principes et les idéologies ont dû tomber pour prendre en compte la réalité et accompagner ces personnes… Jésus, au contraire des accusateurs, entre en dialogue avec cette femme, établit une relation avec elle, et lui donne les moyens de repartir d’un bon pied dans la vie ! Méfions-nous donc de nos réactions spontanées, n’avons-nous pas parfois tendance à utiliser les autres ou à les ignorer pour défendre nos idées, plutôt que de nous mettre, comme Jésus, à leur service, à partir de ce qu’ils sont ?

Juger ou  être fraternel ?

« Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter la pierre. » Qui prétendons-nous être pour juger nos frères ? Je pense encore ici aux terroristes des temps modernes, ils sont capables de fouetter, de couper des membres, de tuer pour non respect de port du voile, pour un vêtement trop coloré ou que sais-je encore ? Ils illustrent parfaitement la petite métaphore de l’évangile : ils ont une poutre dans l’œil – ce sont des criminels– et prétendent enlever la paille dans l’œil de leur frères… Certes on peut faire des remarques à nos frères et sœurs en Jésus Christ, mais ne confondons jamais la correction fraternelle avec le jugement. La remarque fraternelle ne peut avoir lieu que dans une relation d’amour et de respect de mon frère, elle ne doit être faite que si elle peut aider mon semblable à mener une vie plus belle et non pas pour me donner, à moi, bonne conscience !

Sommes-nous des despotes de la morale,

ou des frères en Jésus Christ ?

Méfions-nous de nos réactions spontanées !

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