Apprends-nous à prier !

 

17ème dimanche, année C, Lc 11,11-13 /

La prière existe de tout temps et dans toute religion,  et la façon dont on prie révèle notre conception de Dieu… Vous conviendrez ainsi, avec moi, que la prière au « dieu volcan », auquel on offre des sacrifices humains pour le calmer, n’a rien d’une prière évangélique ! Et pourtant, cet arrière-fond archaïque, ce marchandage avec Dieu, demeure bien souvent présent dans nos façons de prier… D’où la question des disciples : « Apprends-nous à prier ! » Sommes-nous conscient que notre prière, et particulièrement notre prière de demande, a besoin  d’être évangélisée ? Si oui, laissons-nous enseigner par la Parole de Dieu et méditons les deux textes proposés : l’intercession d’Abraham pour la ville de Sodome et la réponse de Jésus à la question des disciples sur la prière.

Accorder sa volonté à celle de Dieu !

Je suis toujours surpris de voir que les commentaires du texte de l’intercession d’Abraham présentent ce texte comme un exemple d’intercession, et ne mentionnent jamais que le « résultat » de l’intercession d’Abraham, c’est finalement la destruction totale de Sodome ! Cela devrait nous inciter à réfléchir un peu plus… Cette prière d’intercession a-t-elle finalement servi à infléchir la décision de Dieu ou à convertir Abraham à la volonté de Dieu ? Car l’intercession d’Abraham révèle sa méconnaissance de Dieu, elle laisse entendre que Dieu pourrait être injuste en faisant périr le juste avec le pécheur… Or, la suite de l’histoire révèle que la décision de Dieu n’était nullement arbitraire et qu’effectivement il n’y avait même pas dix justes, peut-être pas même un seul ! Et, d’autre part, nous apprenons que Dieu s’est souvenu de son Alliance avec Abraham, indépendamment de l’intercession de celui-ci, puisqu’il sauva Lot, le neveu d’Abraham, non parce qu’il était juste, mais en raison de sa parenté avec Abraham, et non pas en épargnant Sodome, mais en faisant sortir Lot et les siens de la zone de destruction… Bref, Dieu, dans sa façon d’agir, n’a rien à voir avec ce que supposait Abraham ! N’avons-nous donc pas besoin, nous aussi, de prier d’abord pour nous convertir à la façon d’être et d’agir de Dieu ? Puisque Dieu s’est révélé comme un Dieu d’amour qui se donne entièrement jusqu’à mourir en croix, sommes-nous sûr que nos prières correspondent toujours à cette révélation ? Lorsqu’on accuse Dieu de nous envoyer des maux et des épreuves, d’être sourd et absent, lorsqu’on suppose sa volonté mauvaise, n’est-il pas urgent de nous convertir et d’accorder notre volonté à celle de Dieu : « Que ta volonté soit faite » ?

Sortir d’une prière magique !

La prière magique consiste à demander à Dieu d’agir indépendamment de nous… « Il y a la guerre à tel endroit : fais que la paix advienne ! » Si Dieu, qui est amour et infiniment plus compatissant que nous, pouvait imposer la paix à coup de baguette magique, il y a longtemps qu’il l’aurait fait ! Nous n’avons ni besoin de l’en informer ni d’infléchir sa volonté en ce sens ! Dans toute demande, il nous faut, au contraire, rechercher notre façon de contribuer à la réalisation de ce que nous demandons. Par exemple, en nous interrogeant sur notre façon de vivre : si nous achetons des produits au coût le plus bas,  nous savons très bien que nous engendrons de l’injustice, de la pauvreté et que nous entretenons des sources de conflits, à l’autre bout de la planète… Mais encore, de façon plus indirecte, prenons conscience que tout ce que nous accomplissons à notre niveau pour faire advenir le Royaume de Dieu a des répercussions sur l’ensemble du Royaume de Dieu en devenir. Et à l’inverse, tout ce qui s’oppose dans nos vies à l’avènement du Royaume de Dieu entrave l’avènement global de ce Royaume de justice et de paix ! N’est-il pas urgent de sortir d’une prière magique et de demander au Seigneur de se servir de nous pour réaliser ce que nous demandons : « Pardonne-nous nos offense comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés. »

Ouvrir ses préoccupations à celles de Dieu !

Un troisième aspect de la prière de demande consiste à ouvrir notre champ de conscience à l’ensemble des préoccupations de l’humanité en recherche de plénitude… Il s’agit de voir le monde avec les yeux de Dieu et de comprendre que ce que le Seigneur veut pour nous et pour le monde ce n’est pas un bonheur éphémère, mais durable : « Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père céleste donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent ! »… « Que ton Règne vienne ! »

Oui, Seigneur, apprends-nous à prier !

À accorder notre volonté à la tienne !

À sortir d’une relation magique à la prière !

À ouvrir nos préoccupations aux tiennes !

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5 réponses à Apprends-nous à prier !

  1. TIENDREBEOGO Justin Wend - Yam dit :

    La prière, une supplication qu’on adresse à l’être spirituel. Un précieux cadeau que nous avons pour nous soulager de nos peines et nous réjouir avec le Seigneur en action de grâce.
    La prière sans toi pourrions – nous supporter le poids de la croix.
    La prière, la prière, la prière je ne vie que pour toi.

  2. Christian Sacy dit :

    L’homélie de Marcel d’il y a quelques semaines, au sujet de ‘l intercession’ d’Abraham, je l’ai trouvé très juste. Il disait qu’on semblait entendre les paroles de Dieu dans la bouche d’Abraham et que les rôles étaient un peu inversés.
    Et cette ‘intercession’ ne ressemble-t-elle pas à la parabole du figuier?

  3. Christian Sacy dit :

    Je tiens à préciser que la dernière
    interrogation vient de moi et non de Marcel.

  4. Josiane dit :

    La prière reste avant tout une relation avec le Seigneur qui chemine chaque jour avec nous .
    La prière de demande se fond dans cette relation avec le Seigneur ; non pas ma volonté mais ta volonté.
    La prière nous aide à grandir dans la Foi et nous convertir chaque jour.
    La prière est une respiration intérieur qui nous donne la Paix, la vrai Paix de Jésus.

  5. Monique dit :

    Tout compte fait, j’ai le net sentiment que le mot « prière » se dit de multiples façons : « Prière d’enlever vos couvre-chaussures », « Je vous prie de m’excuser », « La priant de lui donner quelques grains pour subsister jusqu’à la saison nouvelle… », etc. Et puis, il y a la prière d’action de grâces, la prière d’intercession, la prière de louange… La méditation est-elle une prière ? » Sainte Marie, mère de Dieu, « priez » pour nous… » est-ce une prière ? La prière n’est-elle que s’adresser à Dieu ? qu’en est-il de quelqu’un qui dit prier saint Jude, saint Joseph, saint François d’Assise ? Rien dans tout ça pour me faciliter la vie ! !

    Et la récitation des Litanies des saints ? les Psaumes ? Le « Credo », est-il une prière ou une profession de foi ? Je fends les cheveux en quatre ? Peut-être, mais c’est en fendant les choses en quatre qu’on arrive à saisir ce qui se cache dans une chose mystérieuse. Ou dans une vérité très enveloppée.

    Il y a plus : selon mon expérience, la prière m’apparaît bien être comme ce que sont les pauvres pour les dames patronnesses de Jacques Brel : on a ses pauvres à soi comme on a sa prière à soi… ; ou comme les goûts et les couleurs… dont on ne discute pas. Et pourtant… ! Et pourtant « Lumen Fidei » dit quelque chose de troublant et n’y va pas avec le dos de la cuiller : « La Foi sans la Vérité n’est qu’un beau conte »… ce qui impliquerait qu’il faut plus, et surtout plus, que nos conceptions personnelles…

    Vous avez raison, P. Benoît, notre (ma) compréhension de la prière a souvent le caractère du magique sur lequel vous attirez notre attention… On peut en guérir ? on peut arriver à abandonner une certaine « projection [essentiellement subjective] de nos désirs de bonheur » (Lumen Fidei) ? Curieux comme s’arrêter à nos automatismes les plus « louables » permet de mesurer, ou du moins deviner la profondeur du mystère !

    Merci encore pour ce riche rendez-vous dominical !

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