Un vrai temps messianique ?

3ème dimanche, année C, Lc 1,1-4 ; 4,14-21  /

« Le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux prisonniers qu’ils sont libres, et aux aveugles qu’ils verront la lumière, apporter aux opprimés la libération, annoncer une année de bienfaits accordée par le Seigneur. » (Lc 4,18-19) Jésus de Nazareth en faisant siennes ces paroles du prophète Isaïe, qui annonçait le temps du Messie, nous interpelle à plusieurs niveaux : De quelle messianité s’agit-il ? Qu’attendons-nous de Dieu ?  Et que faire pour qu’advienne ce temps messianique ?

De quelle messianité s’agit-il ?

« Après m’être soigneusement informé de tout à partir des origines, il m’a paru bon d’en écrire pour toi un récit ordonné. »(Lc 1,3) C’est ainsi que Luc commence son évangile qu’il adresse à Théophile et à chacun de nous, lecteurs du vingt-et-unième siècle. Tenons donc compte, si vous le voulez bien, de cet ordonnancement des passages qui sont proposés à notre méditation chaque dimanche de cette année liturgique, marquée par l’évangéliste Luc. Ainsi, juste avant cette scène de Jésus à la synagogue de Nazareth, où il se présente comme le Messie attendu, Luc rapporte l’épisode des tentations au désert, qui porte justement sur la façon dont Jésus doit incarner sa messianité… De quelle messianité s’agit-il ? De quelle puissance divine s’agit-il ? De celle qui permet de transformer des pierres en pains, de se déplacer sur les ailes des anges, de régner avec puissance sur les rois de la Terre ? Ou de celle d’un amour infini qui se fait serviteur, libérateur, accompagnateur ? Le passage d’Isaïe est clair, il n’évoque pas la figure d’un Messie puissant à la manière humaine mais celle d’un libérateur qui rejoint les plus pauvres…

Qu’attendons-nous de Dieu ?

Peut-être me direz-vous qu’il n’y a rien de nouveau dans ce constat… Et pourtant, ne fonctionnons-nous pas sur l’imaginaire du Messie puissant lorsque nous demandons à Dieu d’arrêter, d’un coup de baguette magique, les guerres, les souffrances, les injustices ?… Qu’attendons-nous de Dieu ? : Qu’il fasse une belle terre propre et nette, un « meilleur des mondes », où nous ne serions que des marionnettes sur son grand terrain de jeu ? Ou bien attendons-nous de Dieu qu’il nous apprenne à vivre en êtres humains responsables, capables d’amour, capables de construire un monde fraternel ? Qu’il nous indique le sens de ce que nous avons à vivre, au-delà des apparences trompeuses : cette Bonne Nouvelle annoncée aux pauvres, cette lumière sur nos chemins aveugles ? Qu’il nous libère de nos emprisonnements, de ce qui entrave notre marche vers une vie bonne, responsable, adulte ? Qu’il soit pour nous un père, une mère, un ami sur la route, qui nous accompagne et se réjouit de nos pas en avant, aussi maladroits soient-ils ? Qu’il nous ouvre enfin un avenir – « une année de bienfaits » – cette joie sans fin promise à celles et ceux qui auront appris à vivre en vrais êtres humains, c’est-à-dire capables d’une vie divine ?

Que faire pour qu’advienne ce temps messianique ?

Par ailleurs, je fus surpris, lors de ma méditation de l’évangile, de constater que, sauf erreur de ma part, aucun des quatre évangiles ne rapporte que Jésus aurait libéré des prisonniersoudes opprimés ( si ce n’est au sens figuré : libération du joug de la loi,oudu joug du péché)… Il guérit des aveugles, il annonce la Bonne Nouvelle aux pauvres, mais il ne libère pas du joug de l’oppresseur romain et ne fait pas tomber les murs des prisons… Et pourtant,  Jésus nous dit que c’est aujourd’hui que cette parole s’accomplit ! N’y-a-t-il pas là un indice évident que la mission inaugurée par Jésus de Nazareth est inachevée et qu’il nous appartient de la mener à terme, de mettre en œuvre cet aujourd’hui du temps messianique ? Ne sommes-nous pas nous aussi oint depuis notre baptême, prêtre, prophète et roi, individuellement, bien sûr, mais surtout ensemble, Corps du Christ ressuscité ? Ici encore le chemin est clair : pour que l’Église soit messianique, elle ne peut se présenter ni comme triomphante, ni comme donneuse de leçon, ni comme culpabilisante, ni même comme gardienne de la morale, mais uniquement comme servante, comme libératrice, comme force de justice, de paix de réconciliation, de compassion… Et vous, que pouvez-vous faire pour aider votre communauté chrétienne à incarner cette messianité-là ?

Ne nous trompons pas de figure messianique…

Ne nous méprenons pas sur nos attentes envers Dieu…

Faisons de notre temps un vrai temps messianique !

 

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