Thésauriser ?

 

18ème dimanche, année C, Lc 12,13-21 /

Ce dimanche, la Parole de Dieu vient encore nous rappeler à l’essentiel : Quelle vanité que de vouloir amasser des biens périssables ! Revêtez l’homme nouveau ! Soyez riches en vue de Dieu ! Nous savons bien tout cela et pourtant nous nous laissons toujours reprendre par ce besoin de nous rassurer à travers ce que nous possédons, de mettre notre confiance et notre sécurité dans nos avoirs plutôt que dans notre relation à Dieu et aux autres… Faut-il attendre d’avoir un âge avancé pour prendre conscience de la vanité de certains soucis, pour revenir à l’essentiel, pour vraiment faire nôtre l’enseignement de la Parole de Dieu ? Comme nous ne sommes pas sûrs que la sagesse nous viendra avec l’âge, n’y a-t-il pas urgence à thésauriser au bon endroit dès maintenant ? Amassons donc un trésor dans notre cœur, dans le cœur des autres et dans le cœur de Dieu !

Un trésor dans notre cœur !

Cessons de vivre à la surface de nous-mêmes et faisons place à notre désir profond ! Ou plutôt, pour ne pas paraître trop utopiste, que ce qui occupe nos journées, ce qui apparaît à la surface de nos vies soit de plus en plus ordonné au service de notre être véritable… Je ne peux m’empêcher, ici, de retraduire à ma manière l’intuition de saint Ignace dans Principe et Fondement : « L’être humain est créé pour accueillir l’amour de Dieu, pour l’aimer en retour de toutes les fibres de son être, et pour que cette réciprocité d’amour serve la Vie… afin d’entrer dans la Vie en plénitude ! Les autres éléments du monde, les autres êtres vivants sont, eux aussi, tendus à leur manière, vers cette plénitude de Vie et permettent ainsi à l’humain d’avancer dans sa vocation propre. Il s’ensuit que l’humain doit faire Alliance avec les éléments du monde, dans la mesure où ils contribuent à augmenter sa capacité à aimer et à servir la Vie. Et qu’il doit se dégager de ceux qui l’empêchent d’aimer et l’emprisonnent dans des forces de mort et de destruction. » Alors oui, amassons des richesses dans le trésor de notre cœur, afin d’élargir sa capacité à aimer et à servir la Vie !

Un trésor dans le cœur des autres !

Humainement, déjà, on peut comprendre que nous existons par l’amour que nous recevons et que nous donnons. C’est d’abord un amour, celui de nos parents, qui nous a permis d’advenir à l’existence. Et c’est par ce regard d’amour des parents sur leur petit enfant que celui-ci va pouvoir se développer et grandir sereinement… Le reste de la vie, avant d’atteindre une maturité suffisante, consistera bien souvent, inconsciemment, à rechercher des palliatifs à l’amour de nos parents afin de se sentir, de nouveau, aimés… Nous-mêmes sommes donc en quête d’amour, de reconnaissance et chaque être humain est dans la même situation… L’amour que nous donnons et que nous recevons nous fait exister… Alors n’hésitons pas à amasser un trésor dans le cœur des autres : plus nous leur donnons de nous-mêmes, plus nous existons !

Un trésor dans le cœur de Dieu !

Mais allons plus loin : tout ce que nous avons donné de nous-mêmes aux autres, et en particulier aux plus petits, nous sera rendu au centuple, nous dit l’Évangile ! Mais, ne comprenons surtout pas cela en termes comptables ! En fait, tout ce qui est de l’ordre de l’amour, de la fraternité, de la solidarité, de la qualité relationnelle… participe déjà de la vie de Dieu, fait de nous déjà, en quelque sorte, des ressuscités : « Du moment donc que vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les choses d’en haut… Songez aux choses d’en haut, non à celles de la terre. Car vous êtes morts, et votre vie est désormais cachée avec le Christ en Dieu. » (Col 3,1-3) Ce sont donc toutes ces « choses d’en haut », ces étincelles, en nous, de vie divine qui sont déposées, cachées dans le cœur de Dieu, et à partir desquelles il nous redonnera vie. Mais attention encore à une méprise possible : rechercher les réalités d’en haut ne consiste surtout pas à fuir notre condition humaine, mais, au contraire, à vivre celle-ci sur le plan de l’essentiel évoqué ci-dessus ; c’est-à-dire, celui d’une qualité relationnelle qui nous fasse déjà entrer dans la communion plénière à laquelle nous sommes appelés en Dieu !

Alors faut-il thésauriser ? Oui, mais au bon endroit :

dans notre propre cœur,

dans le cœur des autres,

…c’est-à-dire…

dans le cœur de Dieu !

 

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