Au-delà des apparences !

12 janvier 2014, Baptême du Seigneur, année A, Mt 3,13-17 /

Depuis la naissance dans une mangeoire, et à chaque étape de la vie de Jésus de Nazareth, nous sommes appelés à un acte de foi, au-delà des apparences : Ce petit enfant, emmailloté dans une mangeoire serait le Verbe de Dieu par qui tout existe !? Ce jeune homme qui vient se faire baptiser parmi les pécheurs serait le Fils de Dieu !? Cet homme défiguré par les outrages et qui se meurt en croix serait le Sauveur du Monde !? La question est toujours là-même, et beaucoup de gens nous interpellent : « Vous pensez vraiment que cet illuminé, mort il y a deux mille ans, est d’un quelconque intérêt pour nous aujourd’hui ? Vous croyez vraiment qu’il a sauvé le monde alors que notre monde semble toujours aller aussi mal ? Vous vous imaginez que vos églises qui se vident ont un quelconque avenir ? » Oui, oui et oui, loin de nous aveugler, la foi au Christ nous permet de voir le sens profond de notre histoire au-delà des apparences ! C’est bien ce même regard de foi auquel sont invités les contemporains d’Isaïe ou de Jean Baptiste : Au-delà des apparences, « celui-ci est mon Fils bien-aimé ; en qui j’ai mis tout mon amour. » !

Au-delà des apparences, Jésus de Nazareth est bien le Centre de l’histoire !

Le baptême de Jean était un baptême de purification et de conversion, rappelez-vous ses paroles de feu : « Engeance de vipères ! Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ? Produisez donc des fruits qui expriment votre conversion… » (Lc 3,7-8) Et voilà que Jésus de Nazareth vient se faire baptiser parmi les pécheurs… A-t-il besoin de conversion ? Si oui, est-il vraiment le Messie ? Jean lui-même s’interrogera « Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? » (Lc 7,19) Interrogation reprise par les juifs bien-pensants : « Cet homme qui passe son temps avec les impurs et les pécheurs ne peut pas être le Messie… » Aujourd’hui, l’interrogation s’est déplacée, mais elle persiste : si ce Jésus de Nazareth, que l’on veut bien admirer pour sa compassion et son humanité, était vraiment Dieu, il nous en aurait « mis un peu plus dans la vue » ! Eh bien, nous, croyants, nous affirmons que cet homme sans éclat est le Centre de l’Histoire, l’alpha et l’oméga, le Verbe de Dieu par qui tout fut créé et par qui tout existe ! D’où nous vient cette prétention ? De notre foi, reçue et approfondie jour après jour, qui rejoint une intuition profonde inscrite en nos cœurs : finalement, contrairement aux apparences, cette simplicité, cet amour jusqu’au bout, ce don total, cet effacement devant les hommes : ce sont bien les manières de Dieu !

Au-delà des apparences, le monde est sauvé !

Plusieurs figures du Messie étaient présentes dans l’Ancien Testament : un Messie triomphant ou un Messie serviteur-souffrant… Sans ambigüité, Jésus ne reprendra à son compte que la figure du serviteur souffrant, laissant entendre que son triomphe ne ressemble en rien à celui imaginé par les hommes : « Mon royaume n’est pas de ce monde… » (Jn 18,36). C’est donc bien dans sa vie donnée jusqu’au bout, dans l’amour plus fort que la haine, que le mal a été vaincu une fois pour toute, malgré les apparences… Ne confondons pas notre rêve d’éternité et le Salut auquel nous sommes appelés ! Si notre monde était parfait et éternel, il serait mort ! Car la vie est, au contraire, cet amour à construire à travers, ou grâce, aux aléas de notre vie personnelle, ou de l’histoire du monde… Si notre être était semblable à une sphère parfaite, il n’y aurait aucune prise pour la rencontre, pour l’amour, pour la croissance… Mais puisque notre être est fragile, faillible, blessé, il est justement capable de rencontre, d’amour, de croissance… Le Salut de notre monde n’est donc pas l’anéantissement de sa fragilité, de ses soubresauts, de sa violence, mais l’ouverture de cette vie ambivalente à une autre Vie ! Nous n’avançons pas dans un mur, mais vers le Royaume de Dieu, qui est en train de se déployer, au-delà des apparences ! Le mal et la mort n’ont pas le dernier mot : notre monde est sauvé !

Au-delà des apparences, l’Église est bien l’avant-garde du Royaume qui vient !

On peut, bien sûr, se saisir de toutes les imperfections de l’Église pour la rejeter, la décrier et surtout s’éviter d’entendre ses interpellations relatives à une vie plus juste, plus vraie, plus respectueuse de l’être humain -depuis la conception jusqu’à la mort, en passant par toutes les vies apparemment sans intérêts et non productives-… Et, cependant, au-delà des aléas de l’histoire, au-delà des apparences, cette Église de pécheurs, qui prit naissance à partir des quelques disciples de Jean qui prirent au sérieux la voix venue du Ciel : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; en lui j’ai mis tout mon amour. » (Mt 3, 17), est bien l’avant-garde du Royaume qui vient ! Ne crée-t-elle pas une fraternité universelle, au-delà de toutes frontières ? Son histoire ne regorge-t-elle pas d’hommes et de femmes qui ont, de siècle en siècle, comme le Christ, fait triompher l’amour au sein des conditions de vie les plus inhumaines ? Et, aujourd’hui encore, n’est-elle pas un rempart face au monde de l’argent, du pouvoir, de la domination, du matérialisme, du désenchantement ?

Un jeune homme s’est fait baptiser par Jean, dans le Jourdain il y a deux mille ans…

Et la face du monde en fut changée…

Au-delà des apparences, croyez-vous cela ?

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