Aller son chemin !

056F31 janvier 2016, 4e Dimanche ordinaire, année C, Lc 4,21-30 /

« Mais lui, passant au milieu d’eux, allait son chemin. » Lc 4,30. La conclusion de l’évangile de ce dimanche n’est pas banale et peut susciter en nous une grande consolation, face à toutes les adversités de notre quotidien. Le récit se passe à Nazareth et Jésus, loin d’adoucir son discours envers ses propres compatriotes, leur donne deux leçons un peu dures à avaler… Il leur laisse entendre que les gens de Capharnaüm ont plus de foi qu’eux car, là-bas, il a pu faire beaucoup de miracles contrairement à Nazareth ; et, d’autre part, il leur affirme que les étrangers et les païens les précèdent, car, eux, ont été capables de reconnaître les prophètes au temps de leur visite, comme ce fut le cas avec Élie et Élisée… Alors qu’il y a ici bien plus qu’Élie ou Élisée ! Du coup la réaction ne manque pas : colère, violence, tentative d’élimination… « mais lui, passant au milieu d’eux, allait son chemin. » Saurons-nous, comme le Christ, aller notre chemin : dire ce que nous avons à dire, faire ce que nous avons à faire, ne nous laisser troubler ni par les modes de notre temps, ni par les critiques de nos détracteurs, ni par les louanges de nos admirateurs, mais ne suivre que sa conscience éclairée par le Maître intérieur ? Cela demande de l’audace, du discernement et de l’amour !

Aller son chemin avec audace !

            Jésus de Nazareth n’a jamais manqué d’audace mais cela est particulièrement frappant ici. Lors de sa prise de parole à la synagogue, ses compatriotes semblaient assez admiratifs : « Tous lui rendaient témoignage ; et ils s’étonnaient du message de grâce qui sortait de sa bouche. » (Lc 4,22) Dans l’évangile de Luc, ces expressions sont connotées positivement et on les trouve souvent après une parole édifiante  ou un miracle. Et pourtant, Jésus, connaissant le cœur de ses semblables, et loin de se laisser prendre au jeu du thaumaturge admiré dont on espère plus de miracles ici que chez des étrangers, dit ce qu’il a à leur dire : « vous croyez que je ne suis que le fils de Joseph et que je devrais favoriser mon clan, eh bien non, je suis un prophète et bien plus qu’un prophète, le fils de Dieu, le Messie envoyé à toutes les nations ! » Nous avons ici un résumé de l’ensemble du drame de l’Évangile « Le Verbe de Dieu est venu chez les siens et les siens ne l’ont pas accueilli ! » (cf. Jn 1) Qu’en est-il pour nous, dans notre famille, dans notre milieu professionnel, parmi nos amis, qu’est-ce qui motive nos paroles et nos actions ? Cherchons-nous à plaire, à séduire, à favoriser ou suivons-nous notre chemin avec audace ? C’est-à-dire vivons-nous notre baptême, notre vocation chrétienne à temps et à contretemps, afin de servir la paix, la justice, la vérité, bref le Royaume de Dieu ?

Aller son chemin avec discernement !

            Mais attention, audace ne signifie pas fanatisme, autoréférence ou violence pour imposer sa façon de voir. Jésus de Nazareth ne mène pas son chemin seul, mais il recherche sans cesse comment faire la volonté du Père : « Je suis descendu du ciel pour faire non pas ma volonté, mais la volonté de celui qui m’a envoyé ! » (Jn 6,38) Il s’agit donc de mettre le discernement au cœur de notre vie. L’art du discernement a été abondamment travaillé par nos prédécesseurs dans la foi, que ce soit chez les pères du désert, chez saint Augustin ou, particulièrement, dans la tradition ignacienne. Il s’agit de discerner les désirs multiples qui nous habitent, les esprits qui nous influencent afin d’entendre la voix du Maître intérieur qui vient éclairer notre conscience. Pour s’initier à cet art du discernement, pas d’autre solution que de s’en remettre à un ainé, à une tradition spirituelle, à un accompagnateur… Le but de tout discernement n’est-il pas d’aller son chemin avec droiture, selon la volonté de Dieu, libre de toute influence contraire ?

Aller son chemin avec amour !

       Enfin, n’oublions pas l’essentiel : le chemin que le Seigneur souhaite pour chacun d’entre nous est un chemin au service de l’amour. Si Jésus de Nazareth ne fut pas tué ce jour-là à Nazareth et s’il poursuivit son chemin, ce n’était pas pour « sauver sa peau », c’est que son heure n’était pas encore venue. Par amour de l’humanité et pour lui ouvrir le chemin du Salut, il fallait que Jésus vive tout ce qu’il a vécu : ses prédications, ses miracles, son compagnonnage avec ses disciples, sa passion, sa mort en croix et sa Résurrection ! Oui c’est l’amour de Dieu pour l’humanité qui est le moteur de toute l’histoire du Salut : la Création, l’Ancienne Alliance, l’Incarnation, la Rédemption, la Nouvelle Alliance ! C’est ce que nous redit merveilleusement saint Paul dans son hymne à l’amour : «  J’aurais beau être prophète, avoir toute la science des mystères et toute la connaissance de Dieu, et toute la foi jusqu’à transporter les montagnes… J’aurais beau me faire brûler vif… s’il me manque l’amour, je ne suis rien. » (1 Co 13) Notre chemin sur cette Terre ne sera fructueux que s’il est réellement au service de l’amour.

Oui Jésus a suivi sa voie sans se laisser détourner,

 ni par le diable, ni par les hommes, ni par ses peurs légitimes…

Qu’en sera-t-il pour nous ?

Saurons-nous aller notre chemin,

avec audace, avec discernement et avec amour ?

 

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