1er dimanche de l’Avent, année C, Lc 21,25-28.34-36 /
« Les hommes mourront de peur dans la crainte des malheurs arrivant sur le monde » (Lc 21, 26), mais vous : « quand ces événements commenceront, redressez-vous et relevez la tête. » (Lc 21, 28) Quelle actualité dans ces versets de l’évangile dominical ! Effectivement les événements catastrophiques, déprimants et affolants ne manquent pas dans notre monde en crise, et il y a parfois de quoi mourir de peur ou de désespoir… Je ne m’aventurerai pas à énumérer ces situations désespérantes mais je pense d’emblée à la région de l’est du Congo-Kinshasa, où une guerre larvée fait rage depuis près de vingt ans, une guerre dont on parle si peu alors que le nombre de victimes se compte par millions. On dit de ce conflit qu’il est le plus meurtrier depuis la seconde guerre mondiale, sans compter les déplacés, les kidnappés, les mutilés, les femmes violées et les maigres ressources familiales pillées sans relâche ! Comme l’évoquait un des évêques de la région, Mgr Louis Nzabanita : « J’ai du mal à reconnaître Dieu ici ! » Désespérer, mourir de peur ou relever la tête ?… Car l’histoire de l’Église et la vie des saints témoignent que c’est, paradoxalement, dans ces moments de crise où l’être humain peut donner le meilleur de lui-même ! C’est le paradoxe de la Croix ! Puisque nous entrons ce dimanche dans le temps de l’Avent, puisque nous nous tournons vers la naissance pleine de promesse de l’Enfant-Dieu, n’est-ce pas le moment de relever la tête, de témoigner à temps et à contretemps que le mal n’a pas le dernier mot, qu’il faut saisir les moments de crise pour nous changer et pour changer le monde ?
Des crises salutaires ?
Quand tout semble bien aller, notre vigilance est mise à mal… Que l’on songe aux « trente glorieuses », ces décennies de croissance où l’occident a mis en place un mode de vie fondé sur la consommation effrénée qui, dans le même temps, a fait grandir les inégalités, l’exploitation des ressources au profit des uns et au détriment des autres, sans parler de la pollution, de la détérioration et du réchauffement de la planète, etc… D’une certaine manière, ce modèle en pleine crise auquel nous nous heurtons, nous oblige à repenser totalement notre mode de vie sous peine de foncer tout droit dans un mur ! L’invitation de l’évangile n’en prend que plus d’actualité : « Tenez-vous sur vos gardes, de crainte que votre cœur ne s’alourdisse… et que ce jour-là ne tombe sur vous à l’improviste. » (Jn 21, 34) Les crises que nous traversons : crise économique, crise financière, crise des valeurs, crise du modèle familial, crise des replis identitaires, crise écologique, crise politique, etc., les subirons-nous jusqu’à l’accablement et le désespoir ou les saisirons-nous pour faire advenir un nouveau monde, pour relever la tête ? N’est-ce pas ce dont témoigne, déjà, la fête de Noël à venir ?
Une espérance à toute épreuve !
Finalement, qu’est-ce qui peut susciter la peur et le désespoir, sinon une vision du monde trop matérialiste, trop terre à terre. Je suis toujours effaré par la morosité – c’est un euphémisme – des Français, alors que ce pays a tellement d’atouts, en comparaison à la joie et à l’espérance qui anime des populations bien plus pauvres, luttant pour leur survie au quotidien, notamment dans « les pays du Sud ». Le rapprochement entre l’indifférence religieuse, le matérialisme voire l’athéisme militant et le manque d’espérance et de joie de vivre est-il trop rapide ? Nous constatons en tout cas, a contrario, que le continent africain, pour ne parler que de lui, est une terre et de joie et de spiritualité comme l’écrit Benoît XVI dans l’exhortation post-synodale Africae Munus : « Un précieux trésor est présent dans l’âme de l’Afrique où je perçois le poumon spirituel pour une humanité qui semble en crise de foi et d’espérance, grâce aux richesses humaines et spirituelles inouïes de ses enfants, de ses cultures aux multiples couleurs, de son sol et de son sous-sol aux immenses ressources. » (A.M. n° 13)… Effectivement, si notre horizon est purement terrestre, il-y-a de quoi désespérer, mais si nous croyons avec assurance aux paroles de l’évangile, c’est-à-dire que le mal, que la guerre, que la haine et que la mort n’ont pas le dernier mot, mais que la Vie en plénitude nous attend : alors oui nous pourrons relever la tête, nous battre pour la vie en ce monde sans baisser les bras, sans découragement et avec une espérance à toute épreuve, au-delà de tout échec apparent. N’est-ce pas ce dont témoigne, déjà, la fête de Noël à venir ?
Les crises que nous traversons ne nous forcent-elles pas à inventer un nouveau monde ?
Ce temps de l’Avent, ravivera-t-il notre espérance ?
L’adversité nous conduira-t-elle à mourir de peur… ou à relever la tête ?
Jean-Claude Guilbaud rejoint ma croyance et me suggère une réponse au blogue :
« […] l’espérance chrétienne fait toute sa place à l’attente ».
(dans « Une autre vie est possible », Paris, L’Iconoclaste, 2012, p. 173)
Bon Avent au maître et à ses novices ! TLV