Depuis quelque temps, je suis en train de lire les notices biographiques relatives aux religieux assomptionnistes décédés entre 2000 et 2010… L’ouvrage, réalisé par le P.Jean-Paul Perier-Muzet, propose pour chaque religieux de relater son itinéraire de vie sur deux pages. C’est à la fois peu et dense lorsqu’on évoque 10 ans ou 50 ans dans tel ou tel lieux. Cette lecture, ainsi que l’annonce régulière du décès de l’un ou l’autre confrère, nous donnent l’occasion de méditer sur le poids d’une vie. Dimanche dernier, c’est le P. Xavier Vandermeerschen qui effectuait, à Québec, son passage vers la maison du Père, après 93 ans de vie ici-bas, dont 75 années de vie religieuse et 67 de sacerdoce. Lui qui était belge aura passé 62 années au Québec !
Oui, parmi les frères, beaucoup atteignent un âge respectable, mais d’autres nous semblent partir trop tôt, en pleine fleur de l’âge ou carrément au tout début de leur vie religieuse. L’espérance de vie en Afrique subsaharienne est bien loin de celle des pays du nord… 83,5 ans en Andorre ; 81,5 ans en France ; 58 ans au Togo et 32 ans au Swaziland (en 2007) ! Dans certains pays, on peut donc facilement occulter la mort ou ne guère y penser, mais dans d’autres elle s’invite trop souvent à la fête… Et pourtant, qu’elle soit longue ou brève, quel aura été le poids de chacune de ces vies aux yeux de Dieu ? Bien des saints, surtout les martyrs, ne firent pas de vieux os…
En fait, je ne voulais pas tant m’attarder avec vous sur la longueur de nos vies, que sur le mystère et le sacré de chaque itinéraire… Des religieux ont donné toute leur vie pour la mission, d’autres sont restés au contraire toute leur vie à quelques pas de leur village natal, d’autres encore connurent la prison ou les camps, d’autres vécurent toute leur vie religieuse hors communauté, d’autres enfin passèrent un temps dans le clergé séculier, un temps dans la vie religieuse, un temps dans la vie maritale… Dans ces vies stables ou ballotées, quel fut le port d’attache, l’étoile, le roc ?
Je m’interroge sur l’attitude à tenir face à son propre itinéraire de vie… S’agit-t-il de regarder en arrière, vers ce que nous avons déjà vécu ? S’agit-il au contraire de nous tourner résolument vers l’avenir ? Ou bien finalement de nous inquiéter uniquement du temps présent ? Contrairement à certains dogmes modernes, influencés lointainement par le bouddhisme, je ne crois pas que l’instant présent doive être le seul objet de nos soucis… Mais la relecture de notre passé peut nous donner bien des forces pour consentir à notre vie et nous risquer vers l’avenir, en vivant au maximum ce que nous avons à vivre à chaque instant présent avec disponibilité et sérénité… afin de construire une certaine cohérence dans notre vie, non ?
Finalement, dans notre itinéraire de vie, paisible ou balloté par les tempêtes, quelle étoile suivons-nous, sur quel roc nous appuyons-nous ? Et quel est le meilleur juge ? Nous-même ? Ou notre Créateur et Sauveur posant sur nous son regard amoureux, bienveillant et miséricordieux ?