Non ce n’est pas encore le temps des vacances… Mais le temps de la vacance du Siège apostolique… Et cela suscite en moi plusieurs sourires…
Sourire de voir avec quel empressement on désire combler ce vide le plus rapidement possible… Ne faudrait-il pas avancer le conclave ? Vingt jours sans pape, quelle affaire ! Je rappelle pourtant que la mesure du conclave a été prise suite à l’élection mouvementée de Grégoire X, en 1271, qui avait duré près de 3 ans ! Au bout de 2 ans et 9 mois, les autorités romaines avaient emmuré les cardinaux pour les pousser à la résolution…
Sourire également de voir la plupart des journalistes, reflets de nos contemporains qui ne croient ni à Dieu ni au diable, et surtout pas en l’Église, une, sainte, catholique et apostolique, se ruer sur l’évènement avec moult commentaires, comme si le départ de Benoît XVI ou l’arrivée d’un nouveau pape allait changer leur vie… Confirmant en ce domaine, comme en d’autres, la devise du journaliste : « Je ne sais rien, mais je dirai tout ! » Que les journalistes consciencieux m’excusent pour ce cynisme… Mais vous connaissez cette histoire : un journaliste qui passe trois jours dans un pays écrit un livre, celui qui y passe un mois écrit un article, quant au vieux missionnaire qui y a passé trente années, il préfère se taire…
Sourire un peu attendri de voir ces jeunes catholiques s’insurger contre la renonciation de Benoît XVI… Au-delà des arguments, c’est surtout la fragilité affective qui n’est pas loin, et j’apprécie ce témoignage lucide publié dans La Croix : Après un moment de désarroi, Étienne, juriste rennais de 36 ans, raconte pour sa part avoir eu « un déclic » devant sa télévision: « Jean-Paul II était vraiment mon troisième grand-père, mais il m’a semblé inconcevable de donner systématiquement l’image d’une Église pilotée par un vieil homme. J’étais très attaché à lui et j’avais réussi à reporter, non sans peine, cet attachement sur Benoît XVI. Je mesure aujourd’hui que l’affectivité ne doit pas être première dans mon attachement au pape. »
Sourire encore, au regard de l’histoire, car l’historien Philippe Chenaux nous explique , sur le site de La Croix, que le lien affectif envers le pape ne remonte qu’à la fin du XVIIIème siècle : « Le premier moment marquant a été le voyage de Pie VI (1775-1799) à Vienne, en 1782, lorsque le pape rendit visite à l’empereur Joseph II pour lui demander de renoncer à sa politique anticléricale. Ce voyage fut un échec diplomatique mais un grand succès populaire […] avant le XVIIIème la perception du pape par les fidèles n’était pas teintée d’un aspect affectif. Certes, le souverain pontife était perçu comme chef de l’Église, mais aussi comme souverain italien. Rome contrôlait alors les Églises locales, et les États pontificaux se renforçaient, y compris sur le plan militaire. Le rôle du pape était donc aussi politique. Le renforcement du pouvoir spirituel du pape, au détriment de sa souveraineté politique, a contribué à stimuler le sentiment d’affection à son égard. Les catholiques ont alors eu « leur » pape. »
Sourire enfin, celui de Benoît XVI tout au long de ces derniers jours… Un sourire que j’imagine prolongé par l’allègement du poids porté sur ses épaules depuis de nombreuses années… J’imagine ses nouvelles journées, lui permettant dorénavant de faire la grasse matinée, d’écouter de belles cantates de Bach, de se remettre au piano, de parcourir un bon livre après sa sieste… et de prier bien sûr…
Votre (vos) sourire, P. Benoît, illumine les choses d’une lumière nouvelle (pour moi en tout cas) ; merci et souriez encore !