Faire exister un humain !

Ce que vous avez fait à l'un de ces petits...

Ce que vous avez fait à l’un de ces petits…

      Désolé pour le silence des semaines passées, mais je fus bien occupé par la prédication d’une retraite, par un saut à Lomé pour des formalités administratives, par le rattrapage des accompagnements spirituels différés, par la participation à des premières professions samedi dernier et par une session d’Internoviciat cette semaine. La plupart de ces activités pourraient être rassemblées autour d’un leitmotiv : « Faire exister un humain ! »… Je m’explique, en partant d’une citation de Jean Gouvernaire, jésuite, ayant une grande expérience de l’accompagnement :

« S’il m’est arrivé d’aider quelqu’un, ce fut toujours en le ramenant à son fond personnel ; en repartant du désir de vivre qu’il ressentait à nouveau […] ; en reprenant les choses à partir de son besoin d’agir, de se dépenser, de communiquer avec autrui, enfin de son besoin d’aimer et de se savoir aimé, tous désirs que son intuition percevait comme la part la plus authentique de lui-même. Appuyé sur ce moi véritable, il fallait alors lui faire découvrir sa relation à Dieu, sa manière personnelle de prier, ses possibilités d’expression avec autrui. […] C’est bien là le premier souci que doit avoir le directeur spirituel : faire exister un homme ; sinon il bâtira sur le sable son édifice spirituel. »[1]

       Dans la retraite prêchée à des sœurs, c’était bien là le premier travail : faire exister une femme, capable d’assumer son histoire, les forces puissantes qui travaillent ses désirs, ses réactions, ses émotions… La vie communautaire n’est pas facile, car nous sommes obligés de nous frotter les uns aux autres sans tellement de possibilité de fuite, à moins de prendre la tangente et de s’éloigner de plus en plus du projet pour lequel on a, pourtant, donné sa vie ! De comprendre les mécanismes de la jalousie, des blessures, de son passé qui peut ressurgir à chaque instant, semble vital et nécessaire pour une vie humaine plus libre et plus sereine. Mais la vie communautaire est aussi une immense chance, car elle nous apprend, à travers ces difficultés, à devenir de plus en plus humains et elle nous offre un cadre et des ressources pour avancer sur le chemin de la vie. Quelle chance, en effet, de pouvoir vivre dans un cadre porteur marqué par la prière, par l’échange fraternel, par l’accompagnement spirituel, par la vie partagée au quotidien avec des frères et sœurs d’origine, d’âge, de sensibilité différents des miennes. Quelle chance de pouvoir prendre régulièrement un temps de retraite, de session, de récollection pour se relancer dans une vie plus conforme à ce que nous voudrions vivre !

        Mais il nous faut découvrir aussi de plus en plus que, certes nous sommes façonnés par notre passé et par notre histoire, mais encore plus par notre avenir, par l’œuvre que le Seigneur est en train de façonner en nous : « La figure existe déjà dans le bloc de marbre » affirmait Michel Ange, « il suffit de savoir l’en détacher. » L’être humain est créé à l’image de Dieu, nous dit la Genèse, mais nous avons à cheminer vers cette ressemblance, à dégager tout ce qui masque notre véritable nature. Comment se laisser attirer, aimanter par cette œuvre unique que nous sommes en train de devenir, façonnée par l’amour de Dieu ? Cela ne passe pas par l’oubli ou la négation de notre passé, mais par le fait d’assumer notre passé de façon à pouvoir être suffisamment libre pour aller de l’avant et ne pas se laisser retenir dans les liens du passé. Il s’agit de faire de notre passé un marchepied pour devenir l’être unique, l’œuvre unique désirée par Dieu à partir de notre histoire. Lorsque Michel-Ange parle de la figure qui existe déjà dans le marbre, celle-ci dépend des nervures, de la structure du marbre, de son passé, même très lointain qui a permis qu’advienne cette matière si belle !

        Bref, voilà un peu ce qui marque mes journées ces temps-ci, à travers les différentes activités d’accompagnement : faire advenir l’être humain, le ramener à son propre fond et si possible dégager ce qui fait obstacle à la révélation de ce qui est inscrit en lui ! N’est-ce pas ce que nous avons de plus en plus à vivre dans toutes nos relations ?


 La vie par ici

     Comme évoqué ci-dessus, les semaines passées furent bien occupées et j’ai hâte de retrouver un rythme plus calme afin de pouvoir avancer sereinement dans les cours et les activités régulières du noviciat.

       Ce 21 novembre, nous avons célébré avec nos frères de la communauté de Komah la fête de notre fondateur, le P. Emmanuel d’Alzon. Dans la continuité nous nous associons à nos frères de la province qui feront leur profession perpétuelle ces jours-ci : les frères Viktors Jermakovics et Geoffrey-Kamen Defebvre ce samedi 22 novembre à Cachan ; le frère André Đoàn Hiếu Minh Tuấn ce dimanche 23 novembre à Vinh (Vietnam)… Bonne route à eux et grand merci de leur engagement !

      Dimanche prochain, le 30 novembre, nous proposons, à l’issue de la messe dominicale, une rencontre avec les laïcs qui veulent nous découvrir un peu plus : projection d’un film sur l’alliance laïcs-religieux et échange sur les attentes éventuelles des laïcs de Sokodé par rapport à notre congrégation…

Fr. Serge-Patrick

Fr. Serge-Patrick

    Le 6 décembre, nous célébrerons l’ordination presbytérale de notre frère Serge-Patrick Mabou Simo qui recevra l’ordination des mains de l’évêque de Sokodé, Mgr Ambroise Djoliba, en compagnie de 5 futurs prêtres diocésains. Nous nous réjouissons pour cette étape importante dans la vie de notre frère au service de l’Église et du monde… Le 7 il célèbrera sa première messe dans notre paroisse…

    Enfin le 13 décembre, se tiendra la désormais traditionnelle marche inter-religieuse qui devrait rassembler plusieurs milliers de jeunes de Sokodé – musulmans, protestants, catholiques, animistes – sous la houlette du frère Serge-Patrick, tout nouveau prêtre… Nous souhaitons d’ors et déjà bonne réussite à ce rassemblement !

     Sur ces quelques nouvelles, je vous souhaite une bonne fête du Christ Roi, pour marquer la fin de cette année liturgique et que le Seigneur vous donne de toujours travailler à faire exister des hommes et des femmes debout, et à être au service de la Vie sous toutes ses formes…

[1] Jean Gouvernaire, Lettre à un père spirituel, in  Christus n° 153, p. 75

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